MA 6T VA CRACK-ERDécembre à Toulouse, première parution de MA 6-T VA CRACK-ER film de Jean François Richet (Etat des lieux). C'est un peu la réponse de la banlieue à "La Haine" de Kassovitz. Le seul problème c'est que son film sorti nationalement le 3 juillet 97, à grand renfort de pub, n'est visible dans aucune ville de France (excepté Paris). Pourquoi ?, Dérangeant ? Nul ? Sans intérêt ? Mal fait ? Tous les ragots sont possibles avant sa vision. Après, plus de doute, c'est tout simplement de censure dont on peut parler. Le film est clair, net et précis. Ce n'est plus le folklore ou une comédie que peuvent représenter la Haine (qui ne supporte pas une seconde vision) sur les banlieues, mais une vision de l'intérieur donc moins démago et plus réaliste de la violence subie quotidiennement. Trois projections à la cinémathèque. Mais trois projections de folie. Ambiance de fête, de violences, d'identification totale aux personnages (surtout quand un keuf apparaît). Le ciné devait être comme ça au début, des images tellement fortes et proches de la réalité qu'il est impossible de ne pas réagir. J. F. Richet a fait un film sur sa banlieue, ses potes, sa réalité. C'est à dire des personnages de 15 à 30 ans dans la cité, la journée, le bahut, les sorties, glander, déconner, bastonner ; tout ça sous haute surveillance policière, ce qui ne peut finir qu'en bavure et émeutes. Le flic est là pour ça, non ?

 

IS- Pourquoi d'après toi ton film n'est pas sorti sur Toulouse ? Peut-on parler de censure ?

J.F.R.- Non, mais de pression, oui. Des préfectures ont souhaité que le film ne soit pas diffusé, des distributeurs n'ont pas voulu prendre le risque de le sortir, sous des prétextes foireux ; du fait de ce que le film raconte et qu'il ne peut pas te laisser indifférent.

IS- Justement, tu montres une émeute après une bavure. Penses-tu que c'est la solution ?

J.F.R.- Non, c'est plutôt une réaction saine face à un système de flicage, d'harcèlement policier, de bavures... c'est une soupape de sécurité. Je montre qu'un système peut accepter ce genre de réaction, en te laissant casser pendant 2 à 3 jours et intervenir après. Ça justifie plus de répression, plus de flics dans la rue pour protéger leurs intérêts. Ce que je dis toujours c'est qu'il vaut mieux 6 mois de grève au niveau national que trois ans de guérilla dans les cités. Mais pendant les émeutes t'apprends à bouger, à t'entraider et ça c'est peut être le début de quelque chose à plus long terme. .

IS- Est-ce que tu penses que c'est bien reçu dans ton film ?

J.F.R.- C'est pas une idée bien répandue. Maintenant quand les lascars entendent ça, ils disent "ouais, t'as raison!", mais ils se disent aussi que la vengeance est un plat qui ne se mange pas froid, et donc ils descendent tout de suite.

IS- Donc tu penses qu'il n'y a pas de problèmes spécifiques au banlieue ?

J.F.R.- Bien sûr, ils le savent très bien. Car tout ce qui s'y passe on le sait, on le dit, les bavures, les viols dans les commissariats, les caisses qui crament, les canettes sur les bus, tout le monde en parle. Ce qu'on dit jamais c'est pourquoi ça arrive. Si, ils vont te dire que c'est le chômage, mais jamais que c'est le capitalisme qui crée le chômage. C'est ce que je reproche à toutes les infos, reportages (Tavernier) ou film social (la haine).

IS- alors Pourquoi t'as choisi le ciné pour t'exprimer ?

J.F.R.- Le ciné et le Hip Hop, parce que je crois que c'est les deux médias de consommation les plus usuels, en tout cas pour les quartiers défavorisés. Maintenant c'est pas ça qui va changer la société j'en ai conscience, mais c'est de la résistance.

IS- Tu le vois comment? Les grèves, les manifs, les syndicats...

J.F.R.- C'est bien mais il n'y a aucune unité. Un jour il y aura grève dans tel branche d'activité ou dans telle autre dirigée par les mêmes syndicats, mais jamais de grève en même temps de tous. Ils nous font croire par exemple qu'ils ont des revendications différentes entre le balayeur à Air France et le pilote. Alors que c'est la même, c'est l'exploitation. Voila à quoi sert leurs syndicats, ils font des concessions. C'est des tampons sociaux.

IS- Et les partis politiques?

J.F.R.- Je ne fais partie d'aucun parti bourgeois. c'est à dire de l'extrême gauche à l'extrême droite. Ce qu'il faut se demander, c'est l'extrême de quoi ? Du capitalisme, c'est à dire d'un système inhumain.. Moi je me situe dans son abolition par tous les moyens nécessaires. Et l'extrême gauche là-dedans, c'est le plus grand ennemi du peuple avec leurs belles phrases pour berner la classe ouvrière. Il suffit de voir l'histoire. C'est comme si à la place du capitalisme tu mets le mot esclavage, c'est pas parce que tu enlèveras un maillon que tu seras libre.

IS- LA lutte des sans papiers ? Elle te touche ?

J.F.R.- Bien sûr ! Toute sorte de luttes contre le système me touche. Mais je veux pas me faire entraîner pour des pétitions à la con qui ne sont que du vent. Il faut le dire ! Mais le mouvement des sans papiers a des relations avec SOS racisme, qui a été crée dans les succursales de l'Elysée par le P.S. (leur concept de la main qui a été conçu par Séguéla pour 3 millions de francs) alors qu'on voit comment il les traite. Ou le PC, quand on sait le nombre de logement d'immigrés, rasés par bulldozers, on voit leur cohérence.

Tofe


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