ON DIT 3000, ON DIT 4000,
ON DIT 5000 ... ça dépend si on compte les Mexicains, ça dépend si on compte au début ou à la fin
de la rencontre ... disons que nous étions entre 3000 et ... allez, 4500. C'est comme pour les manifs. En tout cas, ça faisait du monde à San Cristobal, petite ville du Chiapas, lieu de rendez-vous pour l'Intercontinentale (lntercon pour les
intimes).
Mieux valait être déjà accrédité en arrivant, mais quasiment jusqu'à ce que les cars partent, des gens se faisaient accréditer. Cela plus 100 dollars pour les frais, et c'était bon pour le départ. Sans être prévenu, cette somme plus la présence de Danielle Mitterand avaient de quoi en décourager plus d'un.
Le cortège de cars est parti rejoindre la première Aguascaliente, Oventic, pour l'ouverture, puis, dès le lendemain, les participants se sont dispersés dans les quatre
autres Aguascalientes, parfois très éloignées les unes des autres.
Le décor a déjà été planté de nombreuses fois par de vrais-faux crapuleux journalistes, avec en vrac la pluie, la boue (sans pour autant avoir dormi sous la pluie ou dans la boue) , la brume, la commandance (de l'EZLN) à
cheval, la commandance aux tables, la commandance à la tribune, Marcos par-ci par-là sans être omniprésent, la société civile, ou base d'appui, mobilisée en masse
pour l'accueil très chaleureux et pour l'organisation remarquable et paisible, les repas assez variés (il n'y avait pas que des haricots rouges), etc.
Chaque table de travail était divisée en sous-tables, Salle d'ordinateur et bibliothèque dans chaque Aguascaliente.
Spectacle et bal le soir.
TABLE 1 :La Realidad
(Quartier Général des zapatistes)
Aspects politiques : "Comment faire
de la politique autrement ?" .
La démocratie, comme prise de pouvoir
électorale, c'est à dire le libre choix des gouvernants par les gouvernés, a été remise en question. Elle n'est qu'une façade. Il faut un dialogue réel, avec la participation de toute la société civile. La pratique du "commander en obéissant" a été très populaire.
C'est aussi à La Realidad que l'on a pu entendre les "stars" : l'écrivain Eduardo Galeano "Le Chiapas est un centre de résistance contre l'infamie et la stupidité"; les ex-guerilleros Hugo Blanco (péruvien) et Douglas Bravo (vénézuélien); les mères argentines de la place de Mai (qui protestent depuis des années, tous les jeudis, contre la disparition de leurs proches pendant la dictature militaire); ou encore Danielle Mitterand( "Marcos m'a révélé à moi même") (!) et le sociologue-
conseiller du gouvernement Alain Touraine.
TABLE 2: Roberto Barrios :
aspects économiques : " La question économique, une histoire d'horreur".
Le néolibéralisme y a été défini comme
une nouvelle étape du capitalisme, combinant les moyens économiques, sociaux et politiques et privilégiant le capitalisme financier. On s'est demandé si les conditions nécessaires pour faire des changements de ce modèle existaient ou sil fallait d'abord transformer le système politique.
Les propositions essentielles : que les gouvernements des pays sous-développés négocient leur dette extérieure, et que les pays riches réduisent leurs dépenses militaires; reconnaître les besoins et nécessités concrets des gens pour éviter les excès du néolibéralisme; autogestion et réponses communautaires; renforcer les communautés rurales.
Harry Cleaver, économiste texan, a permis de radicaliser le débat :"Si nous ne sortons pas de la logique économique, nous ne sortons pas de la logique du capital. Il faut penser à
des politiques économiques qui n'ont rien à voir
avec l'économie. Les politiques économiques néolibérales parlent de la baisse des salaires.
Que faire ? Les augmenter ? On reste dans la logique du capitalisme. Mieux vaut réfléchir sur ce que sont nos salaires. Nous devons nous demander si les changements que nous proposons sortent de la logique du capitalisme ou si au contraire, elles le renforcent".
TABLE 3: Morélia :
aspects culturels: Toutes les cultures pour tous".
De nombreuses manifestations artistiques
(théâtre, musique, arts plastiques, vidéo...) ont animé les journées de travail. Diverses propositions sont sorties : multiplier les expériences autogérées (radios, journaux...); développer les moyens de communication régionaux; journée mondiale du grafiti; création d'un musée d'art contemporain zapatiste; utilisation massive d'internet, rencontre mondiale des artistes; création d'un réseau mondial de l'espérance.
TABLE 4: Oventic :
aspects sociaux :"Quelle société si elle n'est pas civile ?"
Deux grandes tables, elles-même divisées en sous-tables : une table sur la société civile organisée (ONG, syndicats, mouvements urbains et paysans) et une table sur la société exclue (les femmes - qui se sont demandées
pourquoi elles se retrouvaient là -, les enfants,
les séropositifs, les homosexuels et lesbiennes, les anciens, les toxicomanes).
Les débats ont tourné autour des problèmes quotidiens, des expériences de lutte, pour conclure sur la nécessité de créer des formes de résistance organisée, incluant tous les groupes opprimés. Il a été aussi question de la légalisation de la consommation de drogues et de la disparition des asiles d'aliénés.
TABLE 5: La Garrucia :
Indigènes et identités nationales: "Dans ce monde se cachent beaucoup de mondes".
Le grand capital tend à nier que le monde est une mosaïque de peuples. La tentative de reconnaître la pluralité des peuples et des cultures a nourri les débats. On a parlé des luttes indigènes, au Mexique et en Amérique Latine,
de l'autonomie et de la libre détermination des peuples et des nations, du néocolonialisme, de la conciliation des luttes des femmes avec les cultures indigènes.
Nous nous sommes tous retrouvés (moins les découragés) à La Realidad, le 2 Août, pour faire le point. De la plénière générale sont ressorties les décisions suivantes :
- Création d'un réseau intercontinental de résistance au néolibéralisme.
- Création d'un réseau intercontinental de communication alternative.
- Organisation d'une consultation intercontinentale sur le néolibéralisme pendant la première quinzaine de décembre 96.
- Deuxième rencontre intercontinentale
contre le néolibéralisme en 97, en Europe.
(1) Le gouvernement après avoir rompu le dialogue, annonce son intention d'arrêter les leaders zapatistes. L'armée mexicaine prend possession des villages zapatistes. L'EZLN et la population civile se retirent dans la montagne.
CHIAPAS