Interview
de Walid Attalah, président du Mouvement Justice pour la Palestine- Septembre
2002
Alors que l¹anniversaire du 11 septembre, se rapproche et qu¹une
attaque contre l¹Irak est imminente, l¹offensive de Sharon et de Bush continue
en Palestine occuppée. Le 28 septembre prochain, une manifestation aura lieu
à Baiona, en soutien au peuple palestinien, pour demander la suspension de l¹accord-cadre
liant l¹UE et Israël, et appuyer le boycott des produits israéliens. Walid Attalah,
président hexagonal du Mouvement Justice en Palestine (né à Baiona dans le sillage
du comité stop la guerre) fait le point sur le blocus subi par les palestiniens.
Peux-tu nous faire le point sur la situation actuelle que vit le peuple palestinien
?
Walid
Attalah : Il y a un couvre-feu qui est imposé depuis une dizaine de jours sur
les villes et les villages des territoires occupés. Les gens ne peuvent ni sortir
pour aller travailler, ni pour s¹alimenter. Il y a des raids quasi quotidiens.
Le dernier, à Gaza, a tué une famille de 5 personnes. Israël pratique des bombardements
par air, terre et mer sur toute la côte de Gaza. Les destructions de maisons
continuent. On est à plus de 2500 maisons détruites par l¹armée israélienne,
depuis le début de l¹intifada.
Le
plan " Gaza d¹abord" a t-il changé quelque chose?
Non,
le plan Gaza-Bethléem a à peine été mis en route, une semain après, les choses
n¹avaient toujours pas changé. Israël pratique toujours un blocus militaire,
alimentaire, sanitaire sur la population. L¹accord n¹a rien amené, ni sur la
forme, ni sur le fond Où en est-on, rapport à la volonté de Sharon/Bush d¹évincer
ou d¹éliminer Arafat ? Sharon veut toujours non seulement écarter Arafat, mais
ce dont on parle peu c¹est de la politique quotidienne du gouvernement Sharon/Perez,
qui continue d¹asphyxier et d¹étrangler la population, d¹assassiner les responsables
politiques. Les négociations sont donc, non seulement gelées, mais de plus,
on retourne à une situation de status-quo où c¹est le rapport de force qui va
déterminer l¹évolution du processus politique.
Que
reste-t-il de l¹autorité palestinienne ?
Vu
l¹ampleur des destructions des infrastructures de l¹Autorité et le besoin énorme
en termes matériels et financiers pour reconstruire, l¹Autorité est à plat.
Elle n¹en a plus (de l¹autorité) sur la vie quotidienne des palestiniens. On
est retourné à la situation d¹avant la première intafada (87), où ce sont en
fait les organisations politiques et la société civile palestinienne, qui ont
en mains la gestion de la vie quotidienne des palestiniens.
Bush
a t-il infléchi sa politique de soutien à Sharon ?
Non.
C¹est toujours un appui direct des Etats-Unis à la politique de Sharon. Même
si Bush a dit qu¹il souhaitait " la création d¹un état palestinien ", tout est
fait dans le sens contraire, que ce soit aider à la construction des colonies
de peuplement ou en soutenant l¹armée israélienne, qui détruit tous les jours
l¹Autorité. L¹apparition d¹un Etat indépendant palestinien, dans ces conditions,
ne verrait jamais le jour. Les américains soutiennent Israël pour faire fléchir
les palestiniens et leur faire accepter un plan d¹autonomie un peu plus large
que les accords d¹Oslo, mais sans en arriver à la création d¹un Etat indépendant.
Bush, et certains de son administration, penchent aussi pour attaquer l¹Irak,
ce qui devrait se produire vers le mois de décembre, et là encore, si Bush ne
"réussit pas son coup ", d¹éliminer Saddam rapidement, et que cela dure un peu,
ce sont encore les palestiniens, en plus des irakiens, qui vont en faire les
frais. Sharon va redoubler la pression, de la même manière qu¹après le 11 septembre,
et justifier la répression, en disant qu¹il faut apaiser " le front arrière
", pendant que les Etats Unis et Israël attaquent l¹Irak. On a tout à craindre,
comme le peuple irakien, de cette intervention.
Que
peut-on faire ici ?
Il faut continuer à faire pression sur Israël. C¹est pourquoi la campagne du
boycott des produits israéliens est importante.En France, Italie et Espagne,
la campagne commence à prendre de l¹ampleur. En Belgique et Suisse, elle commence.
En Belgique, à Marseille, qui sont des ports où arrivent les produits, des initiatives
sont prises. La marche du 28 septembre par exemple, qu¹à Marseille est exemplaire,
puisqu¹il y a carrément un quai dénommé Quai Carmel, du nom de la principale
marque d¹agrumes israéliens, où ils sont débarqués. Il faut demander un isolement
diplomatique, la suspension de l¹accord cadre qui lie l¹UE à Israël. Le Parlement
européen avait voté la suspension de cet accord. La commission des ministres
des affaires étrangères européenne n¹a pas voulu entériner cette disposition.
Israël exporte légalement des produits fabriqués dans les colonies de peuplement.
La France doit suspendre cet accord et arrête d¹exporter des produits israéliens.
DOSSIER PALESTINE
SOMMAIRE
Ce
dossier a été réalisé en février juste
avant la victoire de Sharon aux élections. Aujourd'hui, la "Sainte
Alliance" a eut lieu, dans un gouvernement de "salut national"
dont l'objectif est de mener une guerre sans merçi au peuple palestinien
: droite (Likoud) + travaillistes + extrême droite + partis religieux
= l'entrainement de toute cette région dans une guerre totale. A cette
heure ci (5/03/20001) le gouvernement israélien envisage l'entrée
de ses troupes d'occupation dans les territoires sous contrôle de l'autorité
Palestinienne, pendant qu'on criminalise l'Autorité et les collaborateurs
d'Arafat. Hier, pour avoir tiré sur un jeune qui passait dans la rue
et l'avoir tué, un militaire israélien a pris 1 mois femre,
pendant que la foule israéleinne lynchait un ouvrier palestinien dont
le seul tort était d'être dans le même quartier que l'attentat
qui a fait 4 morts.
LES
PALESTINIENS SANS TOIT NI CHOIX
Maisons
dynamitées, jeunes tirés comme des lapins, emprisonnés, blessés, commandos israéliens
déxécutions extra-judiciaires, frappes aériennes sur des civils, blocage des
territoires, humilatiosn et vexations, millions de réfugié-es croupissant dans
les camps, il ne se passe pas un jour sans que lintifada palestinienne ne vienne
rappeller à lopinion mondiale le sort fait depuis 50 ans au peuple palestinien.
Alors que lEtat israélien ne lache que ce que les révoltes lui arrachent, au
prix du sang, la tenue délections en Israël ne saurait hélas apporter despoirs
aux palestiniens. Les changements intervenus (travaillistes/Likoud) dans le
passé nont jamis remis en cause le projet sioniste, auxquel adhère une majorité
de la population, qui jusquà aujourdhui nen a tiré que des avantages. Mais
lirruption une fois de plus de la guerre dans les foyers israéliens et la menace
dune insurrection généralisée entraine lEtat dans une fuite en vant dans la
repression, et la société israélienne dans une schizophrénie guerrière et dangereuse
dont lissue ne saurait être que militaire. Larrivée prochaine du Likoud aux
affaires risque dembraser la région. Les choix faits par la puisance américaine,
la pax américana après la guerre du golfe, de sasseoir sur un réglement global
de la paix au proche et Moyen Orient, ne peuvent quêtre des germes de guerre.
La cohéxistence dun état riche dans un tiers monde ravagé par la misère (après
la mise à genoux de lIrak et sa dégringolade dans le Tiers Monde) est aussi
un facteur de tension. Mais les intérêts occidentaux dans cette région ne sauraient
souffrir la création détats indépendants, même si cest la dernière solution
pour garantir la survie de peuples. Les peuples palestiniens et kurdes sont
dans ce cas. Le discrédit de lONU a a gagné une couche en plus, elle qui a
été incapable de faire appliquer les résolutions quelle avait elle même votée.
En palestine lONU a montré comme avant au Rwnda ou en Bosnie de quel côté du
manche elle est,de celui de limpérialisme. Mais si la cause est juste il semble
pourtant que la solidarité active a du mal à se mettre en place. Génes par la
crainte dêtre accusés dêtre antisémite (ce que ne manquent pas de rappeller
certains pans de la communauté juive), paralysés par une complexité et un rideau
de fumée quil est bien arrangeant de considérer opaque, la Palestine, si elle
est à la une des médias, nest pourtant pas à la une de la solidarité politique.
Pourtant lengagement quotidien de nombreux juifs en soutien à Ia cause palestinienne
vient balayer les arguments de cux qui veulent nous faire croire à une guerre
de religion (voir ci-contre). Il nous semble pourtant necéssaire dessayer de
comprendre cette situation. Cest ce que nous avons tenté, en venant rappeller
des faits de base : historiques, et géo-politiques, qui sembleront évidents
à certain-es mais viendront peut être apporter des éléments de réponse. Des
positions parfois contradictoires sur lanalyse, nétant pas des spécialistes,
mais qui veulent ouvrir un débat, et surtout apporter notre modeste pierre à
lintifada, le soulèvement que nous appellons de nos voeux là bas bien sur ,
mais aussi ici.
Yann
un
peu dHISTOIRE... GUERRES ET NEGOCIATIONS ISRAELO-PALESTINIENNES
-
1947 : Les deux tiers de la population de Palestine (occupée alors par les britanniques)
étaient des Arabes palestiniens qui possédaient 93% du pays.
Les 7% restants étant détenus par la communauté juive. Mais LONU partage la
Palestine en deux Etats, lun juif, lautre Arabe. 86% du territoire donné à
Israël sont alors habités ou possédés, largement sous forme publique, par des
Arabes palestiniens.
- 1948-1949 : Première guerre israélo-arabe. LEtat arabe
(mort-né) est annexé dun tiers par le nouvel Etat dIsraël (composé
alors de 650 000 juifs), toute la Cisjordanie par la Jordanie et la bande de
Gaza est administrée par LEgypte. Les deux tiers de la population palestinienne
(soit près de 900 000 réfugiés) sont expulsés dans les pays voisins et leurs
terres nationalisées par Israël.
1964 : Création de lOrganisation de Libération de la Palestine (OLP),
qui pratique la lutte armée. Arafat en devient le chef à partir de 1969.
1967
: Guerre de 6 jours. Israël occupe le reste de la Palestine
(Cisjordanie, Gaza, Jérusalem Est), le Sinaï égyptien (restitué en 1982) et
le Golan syrien. 300 000 Palestiniens sont encore exilés. Début de la colonisation
systématique des nouveaux territoires occupés. LONU reconnaît le droit au retour
des réfugiés palestiniens en Palestine.
1978-2000
: Invasions du Liban (sanctuaire
de lOLP) et contrôle du Liban Sud par Israël.
1987-1993 : Première Intifada, suspendue avec les
accords dOslo.
1988
: LOLP condamne le
terrorisme.
1993 : Reconnaissance mutuelle dIsraël et de lOLP.
1994 : LAutorité palestinienne gère la bande de Gaza
et une infime partie de la Cisjordanie (application partielle des accords dOslo).
1996
: Victoire aux législatives du Fatah dArafat,
élu président de lAutorité palestinienne, lors des premières élections palestiniennes.
2000-2001 : Seconde Intifada.
POUR
LAUTODETERMINATION DES PALESTINIENS EN PALESTINE
LAutorité
palestinienne ne contrôle encore que 40% du territoire et 20% de la population
de la Cisjordanie (60% du territoire et 99% de la population de la bande de
Gaza), en ne disposant généralement que de pouvoirs
municipaux... Ce territoire éclaté est sous la totale dépendance de larmée
Israélienne, qui décide de louverture et de la fermeture des accès. 90% du
commerce extérieur de lAutorité palestinienne (importations et exportations)
sont contrôlés par Israël. Le PNB palestinien par tête a régressé ainsi de 2245
dollars en 1992 à 1940 dollars en 1999. La même année, le nombre de chômeurs
représentait 20% de la population active en Cisjordanie et 27% dans la bande
de Gaza. Mais un tiers de plus en cas de bouclage par les forces Israéliennes.
Depuis le 28 septembre 2000, début de la seconde Intifada, le taux de chômage
des territoires occupés atteint 50%, soit près de 500 000 travailleurs palestiniens.
Au 30 juin 2000, outre les 2,2 millions de ressortissants de lAutorité palestinienne,
il y avait toujours plus de 3,7 millions de réfugiés palestiniens au Proche-Orient
répartis sur la Jordanie (42%), la Palestine (37,6%), la Syrie (10,4%) et le
Liban (10%). Un tiers de ces réfugiés vivaient dans 59 camps situés en Palestine
(50%), en Jordanie (23%), au Liban (18%) et en Syrie (9%). Actuellement, 27%
des réfugiés palestiniens de Cisjordanie et 55% des réfugiés de la bande de
Gaza vivent dans des camps. Le financement des camps de réfugiés palestiniens
est assuré à 95% par lONU depuis 1948. Mais à partir de1998, laide sest réduite
de 20% et correspond à 94 dollars par an pour chaque réfugié, contre 120 en
1992. Si lAutorité palestinienne est constamment confrontée aux pires difficultés
pour céder aux exigences Israéliennes sans contreparties, cette nouvelle administration
demeure un régime autoritaire. Lentretien des 27 000 policiers palestiniens
absorbe le tiers des dépenses annuelles de lAutorité palestinienne.
Et
en plus dune juridiction dexception à Gaza et de 300 prisonniers politiques,
les arrestations arbitraires, la torture et la peine de mort sont couramment
pratiquées par les fonctionnaires dArafat. De son côté, Israël se veut être
une démocratie, mais uniquement pour ses ressortissants juifs. Les autres, citoyens
ou non, subissent à vie les violences de lapartheid : vol des ressources naturelles,
précarisation économique, destruction dhabitations, déportations massives,
regroupement en ghettos ou en camps, emprisonnements et assassinats. Jusquà
la torture systématique des interpellés, légalisée par Israël depuis 1996 pour
sa sécurité intérieure. Le peuple palestinien veut en finir avec lensemble
des discriminations et agressions endurées, dorigines Israéliennes ou autres.
LIntifada est donc la légitime défense des palestiniens qui veulent vivre libres
en Palestine. Sera-t-elle exercée contre toutes les oppressions ? Même si, dans
le contexte international actuel, la reconnaissance officielle du peuple palestinien
passe juridiquement par la création dun Etat palestinien ? Mais cet Etat en
gestation surveillée, isolé dans une région stratégique, sera difficilement
capable de garantir le droit au retour de lensemble des réfugiés, dobtenir
des dédommagements financiers et dappliquer la souveraineté politique du peuple
palestinien. Car lautodétermination générale des palestiniens nest toujours
pas effective. Et finalement, lEtat Israélien préfère sous-traiter avec un
Etat dépendant mais responsable (même embryonnaire), plutôt quavec un peuple
incontrôlé et nayant plus rien à perdre à ses portes.
Téka
REFUGIE-ES
Les laissés pour compte
Il
y a actuellement, sur 7,9 millions de Palestiniens recensés dans le monde, plus
de 3 millions de réfugiés (dont 250.000 en Israël même, où ils ont été chassés
de leurs villages et n'ont pu y retourner). On a là sans doute un exemple unique
d'un aussi grand nombre de personnes empêchées depuis plus de cinquante ans,
à l'exception d'une infime minorité, de rentrer chez elles, et dont au surplus
la moitié - en Cisjordanie, à Gaza, en Jordanie, au Liban - vivent encore dans
des camps, dans des conditions de grand dénuement. L'avenir de ces réfugiés
paraît sombre. Le gouvernement israélien reste catégoriquement opposé au retour
d'un seul réfugié dans ses propres frontières, et n'accepte qu'à contrecoeur
de discuter la seule éventualité du retour d'un nombre limité en Cisjordanie.
C'est en fait l'existence même du droit au retour qu'il conteste. Quant à la
direction politique palestinienne, elle s'est alignée totalement sur les stratégies
israélo-américaines dans la région.
Les
Palestiniens expulsés en 1947-48 et en 1967 tiennent à leurs souvenirs d'enfance
et à leurs maisons familiales. Ils revendiquent le droit au retour, droit qui
leur est d'ailleurs reconnu officiellement, ainsi que celui de l'indemnisation
de leurs pertes matérielles, par la résolution 149 adoptée par les Nations Unies
en 1948. Ce problème est d'importance et le fait que 50 ans plus tard, 70% des
Palestiniens soient toujours des réfugiés, l'illustre parfaitement. Dans les
accords d'Oslo, le problème des réfugiés a perdu toute priorité. La recherche
d'une solution à ce problème a été reportée aux dernières négociations sur le
statut final des Palestiniens. L'euphorie après le accords de paix et l'illusion
que la question palestinienne était résolue ont provoqué une diminution drastique
des moyens financiers de l'UNWRA, l'agence spéciale de l'ONU pour les réfugiés
palestiniens. De ce fait, les conditions de vie quotidienne des Palestiniens
se sont sensiblement dégradées: dans les territoires occupés, 35% d'entre eux
vivent en dessous du seuil de pauvreté; au Liban, ce chiffre atteint même 60%.
En Israël, tous les partis politiques (l'extrême droite, la droite du Likoud,
mais également la social-démocratie du Parti travailliste et le Mouvement de
la Paix «Peace Now») refusent clairement le retour des réfugiés de 1948 et de
1967. Le gouvernement actuel du premier ministre Ehoud Barak se donne encore
un an au moins pour conclure la convention de paix définitive avec les Palestiniens.
Lors des négociations, le problème du retour de plus de quatre millions et demi
de réfugiés sera le sujet de discussions très difficiles. Même si les Palestiniens
peuvent s'appuyer sur le droit international, ils devront faire des efforts
surhumains pour faire inscrire leur droit au retour à l'agenda politique et
pour trouver un appui efficace auprès des décideurs politiques occidentaux.
C'est la raison pour laquelle BADIL, centre palestinien de recherche pour les
droits des réfugiés, a lancé une campagne de pétition internationale pour le
droit au retour et l'indemnisation des réfugiés palestiniens. BADIL propose
la création d'une «Société palestinienne de la Terre». Cette ONG indépendante
aurait un double but: en premier lieu, créer un cadastre palestinien, auprès
duquel les réfugiés pourraient obtenir toutes les informations nécessaires sur
les biens que les familles palestiniennes ont perdus suite à leur expulsion
en 1948 ou 1967, et, deuxièmement, former un large réseau reliant tous les membres
de la diaspora palestinienne: les camps de réfugiés, mais aussi les individus
éparpillés dans le monde entier. Ce réseau devrait être capable de lancer une
campagne efficace de lobbying en faveur des droits des réfugiés palestiniens.
Badil Resource Center: http://www.badil.org/ Le droit au retour n'est pas seulement
une question de principe, il s'agit d'une revendication réaliste. Un des arguments
israéliens est que le retour est «impraticable» par manque d'espace pour ces
expulsés. Cet argument est réfuté par BADIL: la majorité des Juifs (78%) se
concentre sur seulement 15% du territoire d'Israël, tandis que le reste des
terres - appartenant aux Palestiniens - est peuplé par 154.000 Juifs. L'argument
israélien décrétant le retour des Palestiniens impossible par manque d'espace
n'est donc pas valable. Pendant la période 1989-1997, 800.000 immigrés juifs
se sont installés en Israël, venant de l'ex-Union soviétique et d'Éthiopie.
Or, 27% des immigrés russes ne sont pas juifs, ce qui rend l'exclusion des Palestiniens
encore plus indéfendable.
EMPECHE
A TOUT PRIX LE RETOUR
Entre
1949 et 1953, Israël se dote d'un arsenal juridique pour empêcher le retour
des réfugiés palestiniens et pour régler définitivement leur expropriation:
® La «Loi sur le Retour» donne le droit à tout Juif de toute nationalité
de s'installer en Israël et d'acquérir la citoyenneté israélienne. Cette loi
impose une série de conditions extrêmement sévères aux «non-Juifs» de sorte
que la majorité des Palestiniens expulsés ne peuvent remplir ces conditions
et sont donc interdits de retour;
la «Loi sur la propriété des absents» permet le transfert des
biens des «absents» (les réfugiés) aux organismes juifs;
la «Loi d'exception sur les zones de sécurité» donne le droit
aux autorités israéliennes de créer des zones militaires de sécurité auxquelles
les expulsés palestiniens n'ont plus accès;
la «Loi sur la gestion des terres abandonnées»;
la «Loi sur l'acquisition des terres».
Toutes ces lois ont permis de légitimer l'expropriation des Palestiniens.
Pour ce faire, les Israéliens ont également très souvent recours aux lois d'exception
britanniques de 1936: les «Defence Emergency Regulations». Toutes ces lois ont
un caractère raciste et discriminatoire car elles font une distinction claire
entre «Juifs» et «non-Juifs». Les pays d'accueil Les Palestiniens se sont dirigés
soit vers les localités les plus proches de leurs villages d'origine, soit vers
les lieux où ils avaient des parents ou des connaissances. Paradoxalement, c'est
le petit royaume de Jordanie, le plus pauvre des pays de la région, qui a vu
arriver le plus grand nombre de réfugiés sur son territoire, à savoir environ
500.000 entre 1947 et 1949. La Syrie et le Liban en accueillent chacun plus
de 100.000. L'Irak, pays vaste et riche à l'époque, en reçoit moins de 5.000,
et les pays du Golfe quasiment aucun à ce moment. Mais nombre de Palestiniens,
en particulier parmi les plus qualifiés, iront contribuer à construire l'économie
moderne de ces pays. Au lendemain de la fin de la première guerre israélo-arabe
et de la proclamation de l'État d'Israël, il ne reste plus en Palestine que
150.000 habitants arabes sur une population initiale d'environ 1.400.000 Palestiniens.
COLONISATION
ISRAELIENNE = EXPROPRIATIONS PALESTINIENNES
Installées
dès 1909 en Palestine pour préserver des communautés juives
(généralement dinspiration communiste), les colonies sont
devenues un moyen dagression et de dispersion des possessions palestiniennes.
La superficie des terres palestiniennes, actuellement colonisées ou expropriées
par Israël, représente plus de 55% des territoires occupés
depuis 1967. Les 17 colonies juives de la bande de Gaza, regroupant 5000 colons,
occupent 40% du territoire (les meilleures terres). Alors que plus dun
million de Palestiniens sentassent dans des conditions inhumaines. Entre
1992 et 1996, le nombre de colons juif en Cisjordanie et dans la bande de Gaza
est passé de 100 000 à 150 000 sur 170 colonies. Dans Jérusalem
Est, il a progressé de 150 000 à 200 000. Mais 10% de ces confiscations
ont été effectuées depuis le début des négociations
entamées en 1993 et 500 millions de dollars sont alloués aux colonies
juives dans le budget 2001 dIsraël. La stratégie Israélienne
est donc bien de rendre irréversible toute nouvelle implantation juive
en Palestine par une annexion progressive. Et, à travers cette colonisation
civile protégée par larmée, un récent mouvement
de privatisation des terres (publiques à 90%) se développe en
Israël. Les Palestiniens ne possèdent plus aujourdhui que
10% de leurs propriétés foncières davant le 14 mai1948
(proclamation de lEtat dIsraël). Une commission tripartite
(anglo-franco-turque) avait évalué en 1949 la valeur des biens
palestiniens accaparés par les israéliens à 1124 milliards
de livres sterling, soit plusieurs centaines de milliards de dollars actuels.
Téka
1948,
AL NAKBA, "LA CATASTROPHE"
Interview
d'Elias, Palestinien expulsé en 1948
Je m'appelle Elias Sanbar, je suis né en Palestine, à Haïfa en 1947. Avec ma
famille, en 1948, nous avons été expulsés au Liban. J'ai donc vécu là jusqu'à
l'université. Ensuite, j'ai passé quelques années en France pour poursuivre
mes études. Je suis reparti au Liban et je suis revenu en France en 1978. Depuis
1981, je m'occupe de la Revue dEtudes Palestiniennes. Je suis historien...
"Le départ ou la mort"
En
1948, sur une population de 1 400 000 Palestiniens, nous savons qu¹il n'en est
plus resté que 150 000 au pays. L'expulsion elle-même s'est déroulée
selon un schéma qui a été répété, jusqu'à ce que le pays soit vide. Ça s'est
fait par des guerres. Une guerre avec des unités très mobiles, notamment les
unités d'élite de la Hagannah (armée clandestine juive). Contre une société,
qui à l'époque était quand même déjà exsangue sur le plan de ses capacités de
résistance. Parce qu'elle avait été battue au bout de trois ans d'une énorme
résistance armée contre les Britanniques entre 1936 et 1939. Ses dirigeants
étaient soit exilés, soit emprisonnés, soit dans le pays. Un manque d'armes
qu'on ne peut pas imaginer. Par exemple une ville comme Tibériade a tenu tête
avec 180 fusils sans munitions, Jaffa avec 230 fusils. C'est une guerre qui
a été perdue. A partir du moment, où il y a ces défaites, les habitants étaient
confrontés à une offre : le départ ou la mort... Et pour ceux qui n'en étaient
pas convaincus, il y avait eu quelques massacres pour bien montrer que ceux
qui restaient mouraient. À partir de là, les gens ont commencé à évacuer des
zones où il y avait danger de mort vers d'autres zones palestiniennes à l'abri.
Donc, ce n'est pas au départ l'abandon d'un pays. Et c'est au bout de tous ces
petits départs intérieurs, une fois que toutes les populations ont été rassemblées
dans les trois grandes villes du littoral (Saint Jean d'Acre, Haïfa et Jaffa),
qu'a eu lieu la dernière attaque et les gens sont partis. Vous savez, pendant
des années toute la propagande israélienne disait : les Arabes veulent nous
jeter à la mer. En fait, les Palestiniens, non seulement n'avaient jeté personne
à la mer, mais avaient été jetés à la mer. Moi je sais qu'une partie de ma famille
s¹est enfuie par la mer jusqu'à Beyrouth. Et puis ça a été immédiatement suivi
de tout un dispositif installé aux frontières, qui tirait à vue sur quiconque
tentait de revenir. Parce que les gens, une fois le premier choc passé, ont
commencé à essayer de revenir. Et nous avons, dans les rapports militaires israéliens,
des centaines de personnes abattues aux frontières, mais qui sont qualifiées
de rôdeurs, de voleurs, et de pillards. Et donc, les Palestiniens qui tentaient
de revenir dans leur village, dans leur maison, leur ville, étaient traités
comme des pillards qui revenaient piller des lieux vides. Il y a eu en réalité
deux guerres : une guerre entre les Palestiniens de Palestine et les membres
de la communauté juive en Palestine, qui ne s'appelaient pas encore des Israéliens.
Cela se passe avant 1948, Israël n'est pas encore proclamé. Et cette guerre,
elle, se déroule quasiment de la proclamation de la résolution de partage, c¹est-à-dire
du 29 novembre 1947 jusqu'au 15 mai 1948, date de la proclamation de l'Etat
d'lsraël. Cette première guerre est perdue par les Palestiniens. Le jour même
de la naissance d¹Israël, les armées arabes entrent en Palestine. C'est déjà
la deuxième guerre dans la région, pour la récupération de la Palestine. La
stratégie arabe en réalité n'était pas une stratégie de reconquête. Contrairement
à ce que les Arabes eux-mêmes ont claironné. Les chefs d'Etats arabes étaient
convaincus qu¹il leur suffisait de rentrer en Palestine avec quasiment des forces
symboliques, à peine quelques milliers d'hommes, pour déclencher une intervention
internationale de la part de l'ONU. Le président américain Truman a reconnu
l'Etat d'lsraël quelques heures après sa proclamation. Jusqu'à la veille, les
Arabes, comme le département d'Etat américain, sont convaincus que le projet
du leader juif Ben Gourion a déjà foiré et que les Etats-unis qui viennent -
ce même jour - de présenter un projet de tutelle internationale sur la Palestine,
vont imposer la tutelle. Donc la question va être internationalisée, les gens
vont rester chez eux. Le calcul était que la communauté internationale - Etats-unis
en tête - allait intervenir. Il suffisait que les choses se gâtent un peu sur
le terrain. La deuxième chose est que les préparatifs n'ont pas été sérieux.
Les lettres de Safari, ce général qui faisait la synthèse du rapport de force
et envoyait ses rapports, sont désespérées. Et rien n'arrive...
Il
faut se dire que la totalité des budgets effectivement versés par l'ensemble
des pays arabes n'a pas dépassé le million de livres sterling. À une époque
où en un an la seule communauté juive américaine avait envoyé au mouvement sioniste
plus de deux cents millions de dollars. Pendant que les Arabes passaient leur
temps à parler de se préparer, les armes tchèques déferlaient en Israël sur
feu vert de Staline, qui espérait qu¹il deviendrait le premier pays socialiste
de la région. La France a énormément aidé. Parce qu'il y a eu pas mal de départs
clandestins depuis les côtes du sud de la France. Donc, il y a eu un énorme
ravitaillement en hommes, en matériel, en armes, face à des gens qui étaient
littéralement démunis. Il ne faut pas oublier : la totalité des volontaires
arabes, levés par les pays arabes, a dû tourner autour de sept mille hommes.
Cela ne faisait pas une des onze brigades de la Hagannah. En plus, c'était des
unités irrégulières, faite de volontaires civils. Alors qu'en face, il y avait
des unités armées, entraînées, organisées en brigades, en régiments, avec leurs
officiers, leur artillerie, leur intendance. Le rapport de force était extrêmement
déséquilibré et il était tout à l'avantage de la Hagannah. Une fois poussés
hors de la frontière, les gens ont passé des semaines en plein air à attendre.
"Un
pays qui a été volé à son peuple"
Alors
a commencé un énorme travail au bulldozer. On a rasé plus de 400 localités (
c'est énorme). Donc, on les vide, on nettoie les lieux et on commence à s'installer
à leur place. C'est une énorme opération de remplacement d'un peuple, pas d'occupation.
Un pays occupé, on voit l'occupant, mais on y est toujours. C'est ce qui s'est
passé par exemple en Cisjordanie en 1967 et à Gaza. Les Palestiniens de Cisjordanie
n'ont pas eu le sentiment que leur pays avait disparu. En 1948, le pays disparaît,
et après on leur dit : vous-mêmes vous n'existez pas. C'est un pays qui a été
volé à son peuple, il n'y a pas d'autre terme. Et ce peuple s'est retrouvé en
exil avec non seulement une dépossession totale mais aussi une négation d'existence.
C¹est-à-dire que les Palestiniens ne se sont pas retrouvés uniquement comme
des gens spoliés, il y a eu un déni identitaire, ce qui est une démarche totalitaire
d'annihilation. Et là il y a eu un processus terrible.
C'est
l'ensemble de ces données qui -à mon avis - constituent un crime contre un peuple.
On a réalisé qu'il y avait très peu d'images du départ lui-même, l'arrivée en
exil est très couverte dans les archives photographiques. C'est le départ lui-même
qui n'a pas été photographié et filmé. Je crois que la raison en est très simple.
Les vainqueurs en général - que ça soit en Palestine ou ailleurs - n'imposent
pas uniquement leur pouvoir sur les lieux qu'ils viennent de conquérir, ils
imposent et ils accompagnent cela habituellement de leur propre récit des évènements.
Hors, le récit des évènements développé par lsraël est un récit mythique et
propagandiste basé sur l¹affirmation que les Palestiniens étaient partis d'eux-mêmes,
à l'appel de leurs chefs locaux et des chefs d'Etats arabes. Et nous savons
aujourd'hui - y compris par les travaux des historiens israéliens - que cela
n'a été que pure propagande. Il n'y a jamais eu d'appel lancé aux Palestiniens.
D'ailleurs on ne voit pas comment un peuple vide son pays juste sur un appel.
Une
autre thèse s'est développée par la suite : dans des zones de guerre, il y a
toujours des mouvements de populations. Quand la thèse du départ est devenue
difficile à justifier, on est passé au départ accidentel dû aux opérations de
guerre. Et là, nous sommes dans la troisième phase, qui est que nous les avons
bel et bien vidés et chassés de chez eux. Alors je crois que les documents ont
été détruits. Je l¹ai moi-même constaté dans des archives anglaises, où des
documents étaient répertoriés dans les fichiers mais absents des étagères et
des rayons. Mais le barrage est entrain de céder pour plusieurs raisons ou sous
l'effet de plusieurs forces. Il y a tout d'abord le fait que l'entité peuple
de Palestine, quels que soient les bilans que l'on fait de la négociation elle
même, est à nouveau sur la scène, et il devient très difficile de faire abstraction
de cette réalité lourde. C'est un peuple entier qui est là. L'identité est affirmée,
elle est reconnue universellement. Il y a eu beaucoup de travaux d'historiens
et notamment des travaux de quelques historiens israéliens qui ont cassé le
mythe. Et le fait que cette cassure soit venue d'lsraël même, sur cette question
des conditions dans lesquelles l'Etat d'lsraël est né, a brisé un tabou, soulagé
certains Israéliens qui n'en pouvaient plus de cacher ce qu'ils savaient. Ce
qui a été commis en 1948 est un crime, il ne faut pas avoir peur des mots. Et
porter le secret d'un crime pendant 50 ans est très lourd.
"Les
palestiniens vont payer pour la Shoah"
L'Exodus
n'était pas un cas isolé, mais c¹est le plus médiatisé en 1946. Ça faisait des
années que des cargos chargés de ce qu'ils appelaient les immigrants illégaux
essayaient de forcer le blocus imposé par la marine britannique et de
débarquer de force en Palestine, à la suite de la deuxième guerre mondiale.
Ce qui est intéressant dans l'histoire de l'Exodus - mis à part l'usage qui
en a été fait, c'est devenu une espèce d'image phare de l'entreprise sioniste
et de la création de l'Etat d'lsraël -, ce qu¹il est très important de souligner,
et là on touche à une donnée fondamentale, l'Exodus est un peu le signal ou
la manifestation sur le plan de l'image, du fait que les Palestiniens vont payer
pour la Shoah. L'Exodus est fondamentalement cela par rapport à nous. Les juifs
avaient été les victimes de la barbarie nazie, dans une histoire absolument
terrifiante et unique dans ce siècle. Et petit à petit, la totalité de la planète
s'est un peu débarrassée de ces pauvres survivants en les envoyant prendre la
place de notre peuple qui n'avait pas vraiment été mêlé au drame qui venait
de se dérouler en Europe. Bien sûr par la suite, on dira que les Palestiniens
ont été en réalité, bien entendu, les véritables enfants du nazisme et de Hitler,
et ainsi de suite... Mais bon, ça c'est tellement grossier que ce n'est même
pas la peine de s'y arrêter. Mais il y a eu quand même cette donnée qui a beaucoup
pesé : Israël est apparu pour beaucoup dans le monde, comme la réparation d¹une
injustice. Et comme les Palestiniens ne comptaient pas beaucoup, le fait que
cette réparation en créait une autre n'a pas pesé très lourd dans la balance.
Il y avait une immense mauvaise conscience européenne, une gigantesque lâcheté.
D'ailleurs ce n'est pas par hasard que beaucoup parmi ceux qui l'avaient bouclé
en regardant, en Europe, partir les convois de juifs vers la mort, ont applaudi
quand les Palestiniens se sont retrouvés chassés de chez eux. Ce sont les mêmes
qui l'ont bouclé devant les nazis et qui après sont devenus de fervents admirateurs
du miracle dans le désert, comme on a appelé la création d'lsraël.
Le
retour pour la réconciliation
Le
retour reste une donnée vivante et fondamentale de l'exil palestinien, à savoir
qu'il est lié à l'idée que sans retour, justice ne sera pas faite. Et
qui est donc une espèce d'inversion de l'expulsion. C¹est-à-dire, ne plus être
expulsé et donc être réintégré dans ses terres, ses biens, son village, sa rue.
Je crois que 50 ans plus tard on peut sans exagérer dire que cela reste le n¦ud
le plus difficile, le plus compliqué, le plus explosif de la négociation elle-même.
Parce que vous savez, c'est la seule question qui - à la différence de tous
les autres thèmes de la négociation ou de tous les autres dossiers - ne porte
pas uniquement sur l'avenir. Quand on va parler du retour, il faut que l'on
parle du devenir des exilés palestiniens. Donc on est dans le futur. Mais cela
porte également sur le récit historique, sur l'origine du conflit, ce crime
commis il y a 50 ans en expulsant un peuple de sa terre. Et c'est pour cela
que cette négociation pose et l'avenir et le passé. En posant le passé elle
repose les véritables conditions, les véritables circonstances de la naissance
de l'Etat d'lsraël, et par là renvoie à lsraël la question de sa propre légitimité.
Qu'lsraël ait pu être une solution pour tous les juifs, c'est une chose... Mais
que 1948 ait été également le début d'un malheur pour notre peuple est également
une chose tout aussi lourde, grave et insoluble... L'avenir ne pourra être construit
si cette question n'est pas abordée de front et si elle n'est pas traitée dans
ses circonstances, en tant que n¦ud de départ, qu'origine du conflit. Personne
ne pourra faire l'économie de cette question. Et tant que cette question ne
sera pas abordée et qu'elle n'aura pas trouvé sa solution, on ne sera jamais
dans la réconciliation. Que cela soit bien dit, il peut y avoir la paix, il
peut y avoir des situations - d'ailleurs cela fait des années qu'il n'y a plus
de guerre - il peut y avoir des traités, des accords - je ne dénigre pas tout
cela, c'est très bien - mais il n'y aura pas de réconciliation dans les c¦urs,
tant que cette question n'aura pas été abordée, et que cette immense injustice
commise il y a 50 ans à l'égard du peuple de Palestine n'aura pas été réparée.
Cela n'est pas qu¹une question matérielle, il ne s'agit pas uniquement d'indemniser
des réfugiés qui ont perdu une maison, il s'agit avant de commencer quoi que
ce soit, avant de voir la question du retour des Palestiniens, il s'agit de
reconnaître qu'il y a 50 ans, un crime a été commis. Et il faut le dire aujourd'hui,
il faut demander pardon au peuple palestinien du crime qu'on a commis à son
égard.
Extraits
d¹une interwiew réalisée par Samir Abdallah, réalisateur de "La ballade des
sans papiers"
Jérusalem,
au coeur du conflit
Un
«Plan métropolitain de Jérusalem» est mis au point par l'administration israélienne
qui engloberait le Grand Jérusalem (partie est et ouest) et une portion
de la Cisjordanie (15% du territoire). S'il était mis en oeuvre, ce plan conduirait
à un développement exponentiel des colonies de peuplement juives dans cette
zone. Aujourd'hui, 75% de la population palestinienne de Jérusalem vit en-dessous
du seuil de pauvreté et sa densité démographique est huit fois plus élevée que
du côté israélien. Les logements font cruellement défaut: l'administration israélienne
ne délivre pratiquement aucun permis de construire aux Palestiniens de Jérusalem
et les maisons construites sans permis sont détruites (environ un millier d'habitations
et de bâtiments publics palestiniens ont été démolis depuis 1987 et 4.000 autres
sont en instance de l'être). Israël continue en outre à exproprier des terres
palestiniennes à Jérusalem. Cette «politique de judéisation» menée ouvertement
par le gouvernement israélien pour réduire la présence arabe à Jérusalem porte
ses fruits. Alors qu'en 1990, il y avait toujours dans la partie orientale de
la ville une majorité de 150.000 Palestiniens pour 120.000 Israéliens juifs,
le rapport s'est dorénavant inversé au profit de ces derniers: en 1993, Jérusalem-Est
comptait 155.000 Palestiniens (des «non-juifs» d'après la terminologie israélienne)
pour 160.000 Israéliens juifs. À Jérusalem-Ouest vivent quelques 250.000 Israéliens.
Jérusalem est une ville sainte pour les trois religions monothéistes depuis
le VIIe siècle; «Al Qods» (La Sainte, en arabe) est considérée par l'islam comme
la troisième ville sacrée, après La Mecque et Médine. Proclamée capitale de
la Palestine mandataire, le plan de partage de l'ONU en 1947 en préconisait
l'internationalisation; mais après 1948, l'armistice coupa la ville en deux,
laissant aux Arabes la totalité de la vieille ville et aux Israéliens la ville
nouvelle qui s'est bâtie à l'ouest dès le XIXe siècle, et qui fut aussitôt proclamée
capitale de l'état hébreu. Suite à la guerre de 1967, Israël annexa Jérusalem-Est
et ses environs, gela le plan d'urbanisme de la ville arabe et établit des implantations
juives à la place des résidences, institutions et industries palestiniennes
projetées. Un concept de métropole israélienne s'est développé, qui préserve
la cohésion fonctionnelle et administrative de l'habitat juif bien au-delà des
frontières israéliennes d'avant 1967: le «Grand Jérusalem». Du même coup, la
métropole palestinienne se voit réduite et poussée à se développer, non vers
les villes arabes des environs, mais en direction de l'avant-pays juif en Israël
et de l'arrière-pays arabe. En 1980, le 30 juillet, la Knesset déclare faire
de «Jérusalem réunifiée la capitale éternelle de l'État d'Israël». Le 20 août,
le Conseil de Sécurité des Nations Unies adopte la Résolution 478 - soutenue
par les États-Unis - déclarant cette décision nulle et non avenue. La population
arabe de l'agglomération s'accroît rapidement: elle pourrait passer de 400.000
âmes à 00.000 en l'an 2010. Le taux naturel d'accroissement de la population
juive est, lui, bien inférieur. Seul un effort de colonisation à grande échelle,
tout autour de la vieille ville, peut donc permettre à l'État juif de neutraliser
la pression démographique palestinienne et d'assurer sa domination sur le «Grand
Jérusalem». http://www.multimania.com/ima/
1987/2001
: DUNE INTAFADA À LAUTRE
Le
8 décembre 1987, poussé par le désespoir, la pauvreté, et les persécutions,
les enfants pamestiniens lançaient lintifada (le soulèvement en arabe) Au prix
de centaines de morts, de milliers de blessés et darrêtés, elle parvenait
à faire ressurgir sur la scène internationale le droit des palestiniens à vivre
sur leur terre. En plus davoir arraché le droit à lautodétermination, jusque
là impitoyablement renié, en Israël elle a ouvert quelques brèches : coût collosaux,
sapage du moral des troupes doccupation (réservistes faisant tous les ans une
période dans les territoires occupés...) et elle a remis la question palestinienne
au centre de la vie politique. Véritable mouvement de masse, elle a ausi fédéré
la socité civile palestinienne. Mais dès le départ, le contôle du mouvement
a échappé à la direction palestinienne de lOLP, alors en exil, et qui avait
déjà tendance à sembourgeoiser dans les capitales arabes, malgré la liquidation
par des commandos extérieurs du Mossad de ses membres les plus actifs. (Pratique
qui continue aujourdhui avec lassassinat de plusieurs dizaines de cadres de
lOLP par le Mosad, dont la devise est Dieu pardonne, mais pas le Mosad...)
Pendant quune direction intérieure de lintifada, plus jeune, plus proche
des préoccupations des gens, moins apte aux concessions, émergeait, lEtat israélien
comprenait enfin lintérêt quil y avait à négocier avec Arafat, avant que cela
naille plus loin (En Israël il était alors interdit à un citoyen israélien
de rencontrer un membre de lOLP, le Mossad a même financé le Hamas pour affaiblir
lOLP)). De plus, après la guerre du golfe, lOLP se retrouve affaiblie au niveau
international (soutien à lIrak, arrêt de la manne des monarchies pétrolières,
liquidation de lintifada etc...). Limpérialisme américain, renforcé par sa
victoire sur lIrak, hégémonise sa position dominante. Les pays arabes se sont
retrouvés dans une coalition qui a défendu Israël, la question palestinienne
devient un problème local. Pour cela, fi dune paix globale au proche et Moyen
Orient, il faut négocier par petits bouts, cest la paix séparée : chacun est
invité à signer avec son voisin (ce qui aboutira plus tard aux accords avec
lEgypte, la Jordanie, la syruie sur le Liban) Cest à ce moment (en 93) que
Perès, , rejoint par Rabin décide quil sera plus facile darriver à un accord
avec Arafat. Cest le début du processus dOslo, qui aboutira a un accord inique,
partitionnant la palestine en mini zones éclatées, sasseyant définitivement
sur le droit au retour des 3 millions de réfugiés palestiniens, sur la politique
dapartheid. Cet accord entérinera lexistence de bantoustans palestiniens
à côté dun état au niveau de vie ocidental. Les cadres palestiniens commencent
à renter, les crédits européens et américains arrivent, les attentes du peuple
palestinien sont grandes et toutes les conditions sont réunies pour la cosntruction
dune petite bourgeoisie palestinienne, qui ne tarde pas à se constituer. La
corruption ne tarde pas à devenir une pratique courante, tandis que les droits
de lhomme, ne sont pas la priorité de lAutorité Palestinienne : violences
policières, peine de mort pour les collabos, procès bidons, interdiction de
médias...De plus lantagonisme entre le niveau de vie de ces nouveaux riches
et la misère croissante ne peut quaccentuer les tensions, dans une population
exaspérée des humiliations de dizaines dannées doccupation militaire De plus
la frustration croissante ne peut que renforcer les mouvemenst les plus extrémsites,
tel le Hamas, auréolé de sa victoire militaire au Liban. Cest dans ce contexte
que la 2eme intifada, marquée déjà par plus de 390 morts et 2000 blessés, explose,
lors de la venue dAriel Sharon sur lesplanades des mosquées. Cest ainsi que
le sort des bourgeoisies (palestiniennes et israéliennes) se retrouvent liés.
La première intifada a arraché le droit à lautodétermination, désormais, les
palestiniens nont plus rien à donner, que vont ils réussir à arracher à Israël
?
Yann
A
la source des problèmes... L EAU DES RELATIONS A SEC...
Leau est une ressource rare dans tout
le Moyen-Orient, source de nombreux conflits dans la région : dispute entre
LIrak, la Syrie et la Turquie à propos de lEuphrate et du Tigre ; litige entre
la Jordanie, La Syrie et Israël à propos du Jourdain ; tension constante entre
lEgypte, le Soudan et lEthiopie pour le partage des eaux du Nil. La
politique dIsraël dans le domaine a toujours été une appropriation par la force
des ressources existantes sur la région. En 1947, les premiers colons, originaires
dEurope Centrale (pays très humide), arrivent en terre promise et développent
un important secteur agricole avec des pratiques peu adaptées à la gestion de
leau. À cette époque, Israël utilise cinq fois plus deau par habitant que
ses voisins. 3% seulement du Jourdain se trouve en Israël. Cela crée rapidement
des tensions qui persisterons jusquà la guerre des Six Jours qui mettra un
terme aux projets hydrauliques des États Arabes (destruction dun barrage en
chantier en Jordanie) et permettra la main-mise de létat hébreux sur les principales
sources du Jourdain, situé sur le plateau du Golan(alors à la Syrie). A la même
époque, leau est déclaré ressource stratégique sous contrôle militaire. Les
sources du Golan fournissent 770 millions de m3 deau à Israël qui se déversent
dans le lac de Tibériade (principal réservoir naturel de la région), ce qui
assure à Israël un contrôle total sur cet endroit hautement vital. En 1982,
sous prétexte de sécurité nationale, Tsahal rentre au Liban. Rapidement ils
prennent position dans tout le sud du pays, sassurant du contrôle de la rivière
Litani et de diverses sources alimentant le lac Tibériade. Aujourdhui, Israël
exploite environ 98% des ressources sous son contrôle et à terme sera obligé
de revoir sa politique en matière de répartition entre les besoins domestiques
et les besoins de lagriculture, ou bien il devra semparer de nouvelles ressources
au détriment de ses voisins. Les terres palestiniennes au compte goutte La situation
entre israéliens et palestiniens est encore plus défavorable pour les arabes.
Létat hébreux exploite les eaux palestiniennes sans limites ni contraintes.
Actuellement, selon la Banque mondiale, 10% seulement de leau est attribuée
aux palestiniens de Cisjordanie. Cela permet dirriguer 5% des terres arables
alors que 69% des terres exploitées en Israël le sont. Il faut savoir que lagriculture
représente 5% du PNB israélien contre 30% pour les palestiniens. En 1987, les
quotas fixés par les autorités israéliennes pour la Cisjordanie étaient approximativement
pour les colons de 1000 m3 par an et par habitant contre 137 m3/an pour les
palestiniens. En bande de Gaza, 2326 m3/an pour les colons contre 123 m3 pour
les palestiniens. De plus, dans cette région, le pompage massif dans les nappes
phréatiques a provoqué une pollution qui rend cette eau pratiquement impropre
à la consommation. La législation sur laccès aux sources est aussi en faveur
de létat colonisateur. Par exemple, un agriculteur palestinien peut creuser
un puit jusquà une profondeur de 100 m. Un colon israélien peut creuser jusquà
600 m. Il en résulte un assèchement des puits palestiniens et la perte conséquente
de récoltes entières. En surface, les deux tiers des eaux provenant de la vallée
du Jourdain (1300 1500 millions de m3 par an) sont utilisées par Israël et
ce qui arrive dans les territoires palestiniens est impropre à la consommation
(on y mesure un taux de chlore supérieur à 8000mg/l). Actuellement, tous les
experts conviennent que, dans le contexte de raréfaction croissante de leau
dans la région, seule une coopération régionale permettra datténuer la pénurie
qui paraît inéluctable. Israël doit arrêter dagir en peuple dominant, sinon
il naura jamais la paix à laquelle soit disant il aspire. Cette situation
démontre également lexploitation sans partage des ressources naturelles par
un pays du Nord face aux pays du Sud, sauf quIsraël a oublié que, contrairement
à lEurope ou aux Etats-Unis, les problèmes provoqués par ce néo-colonialisme
se retrouvaient à 40 km de Tel Aviv.
Didier
LES
LIMITES DU FAR-WEST ISRAELIEN
La
société Israélienne est historiquement divisée entre les ashkénazes
(juifs dascendance européenne) et les séfarades (juifs dascendance orientale)
que le racisme local dénomme juifs arabes. Les premiers regroupent la grande
majorité des juifs les plus aisés économiquement et les mieux formés culturellement,
des juifs laïques et athées ainsi que les citoyens arabes, qui forment la gauche
Israélienne (au pouvoir sans interruption jusquen 1977). Les seconds concentrent
la grande majorité des victimes des discriminations économiques et sociales,
moins scolarisés, ainsi que la plupart des juifs religieux et des colons, qui
composent la droite Israélienne. Cet antagonisme social saccompagne dune
déception politique dans le projet socialisant de la construction dIsraël.
Toujours à la pointe des hautes technologies, son économie prospère dans la
région est garantie par 80% déchanges commerciaux avec les Etats-Unis et lEurope.
Mais le salaire minimum Israélien nexcède pas 4000 F par mois, lallocation
chômage dépasse tout juste les 3000 F mensuels et le minimum retraite atteint
2400 F. Les Israéliennes sont rémunérées 40% de moins que les Israéliens. La
proportion de familles vivant en dessous du seuil de pauvreté est passée de
28% en 1979 à 34,5% en 1996. Quant aux enfants dans le même cas, leur pourcentage
a grimpé dans la même période de 23% à 33,5%. La généralisation des contrats
personnels (payés à lheure et sans réglementation) concerne 40% de la population
active Israélienne. Lintérim représente 7% de la main-duvre et jusquà 30%
dans les services publics. Autre ségrégation, le statut particulier de certains
nouveaux arrivants, des citoyens non juifs et des immigrés. Bénéficiaires en
1984 de laide au retour, les 60 000 Falachas (juifs dEthiopie) subissent un
racisme généralisé en Israël : des maires refusent de les accueillir et des
directeurs décole nacceptent pas leurs enfants. Reclus dans des ghettos et
sans ressources, la plupart dépendent de laide sociale. Le sixième de la population
Israélienne, qui est non juive (soit un million de personnes, dont 750 000 musulmans(arabes
israéliens), 150 000 chrétiens et 100 000 druzes), restent des citoyens de seconde
zone. Jusquen 1966, ils étaient soumis à lautorité militaire. Sans droits
à la propriété foncière, ils sont également victimes de spoliations de leurs
terres, tels les 80 000 Bédouins du Néguev (désert au Sud dIsraël) dont la
moitié ont été regroupés dans 7 agglomérations réserves. Enfin, quelques 200
000 immigrés (soit 10% de la population active) travaillent dans lagriculture,
le bâtiment, lindustrie et lhôtellerie pour des salaires deux fois inférieurs
à ceux des Israéliens. Chaque autorisation dimmigration délivrée par Israël
coûte 9OOO F et ces travailleurs ont leur passeport confisqué durant leur embauche.
Cet Etat raciste et impérialiste a donc besoin dennemis arabo-nationalistes,
arabo-islamistes ou tout simplement arabo-terroristes pour justifier sa domination.
Ses moyens sont avant tout destinés au complexe militaro-industriel, dont sont
issues la plupart de ses responsables politiques. Israël est ainsi en 3e position
au Moyen-Orient pour le budget consacré à la défense : 6,7 milliards de dollars
en 1999 (après lArabie Saoudite et la Turquie). Israël est aussi le cinquième
exportateur darmes au monde et la première puissance militaire régionale de
par sa possession de larme nucléaire, son armée mobilisée en permanence et
sa collaboration avec le nouveau système américain de missiles antimissile Arrow.
Cette dernière aide sécuritaire des Etats-Unis serait évaluée à 17 milliards
de dollars pour renforcer Israël comme avant-poste, face au danger Iranien
et Irakien.
Téka
EN
ISRAEL, DES HISTORIENS REMETTENT EN CAUSE LA
REECRITURE DE LHISTOIRE
Infirmant
la thèse selon laquelle la population arabe serait partie spontanément ou aurait
répondu à l'appel au départ par les pays arabes,
des historiens israéliens ont eu accès à une partie des archives de l'époque
et remis en cause l'historiographie officielle israélienne concernant la naissance
du problème des réfugiés de Palestine entre 1947 et 1949. Leur travail apporte
un éclairage nouveau sur cette période et offre pour la première fois une lecture
qui rejoint ce que les Palestiniens ont toujours décrit comme une expulsion.
Ces nouveaux historiens remettent en cause la mémoire officielle israélienne
devenue celle de la société. En fait, des villes entières se sont vidées de
leurs populations arabes sous l'effet de la guerre menée par les services de
la Haganah, milice israélienne. L'attaque du village de Deir Yassin en avril
1948 et le massacre de sa population sont restés le symbole de cette stratégie.
Les massacres puis la diffusion massive de l'idée du risque de reproduction
de la terreur ont provoqué la fuite de 200.000 Palestiniens avant même la proclamation
de l'État d'Israël et la mobilisation des armées arabes.
ISRAEL
: "le militaire civilisé dans une société militarisée
Le
sionisme qui a contribué à la formation de lEtat hébreux est devenu aussi lidéologie
de son gouvernement après sa formation. Le fait dêtre exposé à la guerre avec
ses voisins a créé une situation qui privilégie la sécurité
à tous les autres problèmes. Les valeurs et la pensée militariste ont pénétré
sur la scène politique de la société israélienne et se sont infiltrées également
dans les domaines économique, industriel et culturel.
Une
naissance au forceps
Le conflit
israélo-arabe est par beaucoup de traits un conflit de type colonial, surtout
depuis la guerre des Six Jours (juin 1967) et laffrontement avec les Palestiniens
lié à loccupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Depuis décembre
1987 avec lIntifada, la situation est devenue tragique. Dun côté les Arabes
(1 200 000 en Cisjordanie et 950 000 à Gaza) demandent lautodétermination,
de lautre Israël se réfugie soit derrière des arguments de sécurité (travaillistes),
soit derrière un droit historique ou religieux (Likoud). Israël sest constitué
à partir de limmigration massive dune population soutenue par de forts investissements
extérieurs et possédant un haut degré dorganisation. En 1897, Herzl fonde lOrganisation
sioniste mondiale; en 1920, la déclaration Balfour (2 novembre 1917) est incluse
dans le mandat sur la Palestine accordé par la SDN à la Grande Bretagne, avec
la reconnaissance de la branche locale de lOrganisation sioniste mondiale en
Palestine : lAgence juive. Une assemblée est élue de manière assez irrégulière.
Celle-ci élit un Comité nationnal (Vaad Leumi) organe exécutif. LAgence juive
(dirigée par Ben Gourion) et le Vaad Leumi créent une structure de société au
pouvoir très centralisé ainsi quune armée semi-clandestine, La Hagana.
Un
Etat religieux...
LAssemblée
législative, la Knesset, est formée de 120 membres élus au scrutin proportionnel
et national (pas de circonscriptions) sur des listes présentées par les partis,
sans possibilité de panachage, doù une profusion de partis et une concentration
du pouvoir dans les états-majors des partis. Jusquen 1977, le parti Travailliste
est au pouvoir, puis il y a équilibre avec la droite, puis fragmentation : en
1999, les deux grands partis, Travailliste (issu de la tradition des premières
vagues dimmigration des juifs des pays dEurope de lest dans les années 20
, ashkénazes) et Likoud (représentant les juifs séfarades dOrient et dAfrique
arrivés après lindépendance) nont plus que 45 des 120 sièges. Ils doivent
sallier pour gouverner aux partis du Bloc religieux (Parti National Religieux,
sioniste ; Shass ultra orthodoxe séfarade), enfin le PC recueille la majorité
des voix des arabes israéliens (un million sur six millions). Devant des majorités
impossibles à trouver, lélection du premier ministre se fait depuis 1996 au
suffrage universel. Bien que le gouvernement israélien ne soit pas un gouvernement
religieux, il se présente en tant que gouvernement juif et na jamais cherché
à séparer légalement la religion de la politique. Bien que de nombreux politiciens
(Ben Gourion, Golda Meir...) estimaient que la religion nétait que superstition,
comme de nombreux intellectuels laïcs, et sont une majorité à essayer de trouver
un amalgame entre les principes du culte et ceux du sionisme afin que les juifs
et la société politique sy intègrent tous les deux. Cest un instrument efficace
pour la réalisation des objectifs nationaux.
Militarisation
sociale et état de guerre
La politique
israélienne est dominée par la question de la sécurité et son histoire est celle
de ses guerres : guerre dindépendance (1948-1949), campagne du Sinaï (1956),
guerre des Six Jours (juin 1967), guerre du Kippour (octobre 1973), opération
du Liban (à partir de juin 1982). Depuis 1967, cest larmée qui administre
les territoires occupés : un corps dofficiers dactive sest développé. Après
la retraite à 45 ans beaucoup passent dans la vie publique. De nombreux hommes
politiques actuels sont danciens généraux. Tsahal, abréviation pour Armée
de défense dIsraël, joue un rôle militaire mais aussi social important. La
conscription touche les hommes (3 ans) et les femmes (20 mois). Des 6 millions
dhabitants, presque 645 000 sont des militaires : 141 000 conscrits et 504
000 réservistes ; 135 000 autres font partie de milices. La défense est assurée
par les forces de réserve : chaque soldat effectue après son service des périodes
de 30 jours par an. En moins de 24 heures, lensemble de larmée peut être opérationnel.
Les Arabes israéliens sont dispensés (pas les Druzes), de même que les étudiants
religieux (10% dune classe). Dans larmée, on se sert des valeurs religieuses
juives en respectant rites et symboles pour hausser le moral des troupes et
diminuer les tensions entre Israéliens laïcs et religieux. Larmée comme les
écoles, en propageant les valeurs du judaïsme et de la non séparation de la
religion et de la politique joue un rôle dans la socialisation des Israéliens
et dans la réduction des tensions entre la religion, lEtat, la société et larmée
en Israël.
Un
budget de la Défense, sinon rien
Israël
consacre 5 milliards de dollars par an à son budget militaire, 25% du budget
de lEtat. Recherche et industries civile et militaire travaillent pour larmée
: armes légères, armes lourdes, tanks, aéronautique, électronique... Elles représentent
le quart de la force de travail, un tiers de la production militaire est destinée
à lintérieur et les deux tiers sont exportés. Le déficit du budget est considérable,
les israéliens ne subviennent quà 25% de leurs dépenses, le déficit est comblé
par le gouvernement américain à hauteur de 3,6 milliards de dollars par an (
et 600 millions par la diaspora). La dette sélève à 24 milliards de dollars
et fait dIsraël un des pays les plus endettés, qui nest pas sans ressembler
à un gouvernement rentier, extrêmement vulnérable et dépendant des Etats Unis
qui considèrent Israël comme un point dappui dans la région depuis la chute
de lIran.
Sam
NOUS
nIRONS PAS LA FAIRE
«Au
moment où l'on franchit la frontière, où l'on entre en Cisjordanie, on devient
un assassin potentiel. C'est ce que j'ai senti. Parce que tout enfant peut me
lancer une pierre, et je serai obligé de courir après lui, ou de tout faire
pour me protéger. Face à ce piège, la seule solution possible, sur le plan émotionnel
comme politique, c'est de refuser de faire son service. Refuser de servir revêt
une signification politique, et, pour moi, c'était important, quitte à risquer
la prison, pour peser sur le cours des choses. » Ainsi parle Igal Ezrati,
un des cinq objecteurs de conscience israéliens interrogés par David Benchetrit
dans son film On tire et on pleure. Mais le drame qui se joue de l'autre côté
de la Méditerranée donne à la réflexion des objecteurs israéliens un poids particulier.
Leur acte courageux remonte à la guerre du Liban - et même avant pour le « pionnier
», Gadi Algazy. Créé en 1982 pour regrouper les objecteurs de conscience lors
de l'invasion israélienne du Liban, le mouvement Yesh Gvoul (Il y a une limite)
a publié, début octobre 2000, un nouveau manifeste, intitulé : « La guerre sur
les terres d'Ariel, Beit-El, Beit-Hadassa et Kiryat-Arba [colonies juives en
Cisjordanie occupée], sur le tombeau de Joseph et le tombeau de Rachel, n'est
pas notre guerre ». Ce manifeste, qui encourage les soldats - sans décider à
leur place - à refuser de s'engager dans cette sale guerre, a notamment été
distribué dans les endroits où ils font de l'autostop et dans la gare prin cipale
des autobus à Tel-Aviv. Premier objecteur connu de l'« intifada d'al-Aqsa »,
le conscrit Noam Qouzar (dix-neuf ans) a été condamné, le 4 octobre 2000, à
vingt-huit jours de prison ferme pour avoir refusé de se rendre dans les territoires
occupés.
ANTISEMITISME
Les ennemis de nos ennemis ne sont pas nos amis...
Lextrême droite voudrait profiter de la situation pour attiser la haine entre
communautés. NON lantisémitisme na pas sa place ici Toute action qui prend
pour cible la communauté juive doit être condamnée. Ce qui est en cause ici
cest le sionisme, en tant que mouvement politique. Les juifs en tant que tels
nont rien à y voir. Par contre, les mouvemenst sionistes durs en France existent
qui soutiennent par des moyens souvent violents lEtat israélien. On peut légitimement
penser quil y a une bonne dose de provoc de fachos dans les actions violentes
menées cet été contre des synagogues. Juifs, chrétiens ou arabes, on a le même
ennemi : le racisme et le fascisme. Attachés de longue date au combat antifasciste,
il nous semble légitime et cohérent dêtre antiraciste et antisioniste. Car
le sionisme est basé sur le racisme, il sappuie sur une démarche dapartheid,
il doit donc être combattu au même titre. Le combat antiraciste ne peut avoir
de frontières, de même que le fascisme na pas vraiment de patrie, islamo-fascistes,
intégristes cathos ou partisans du Grand Israël, ils combattent pour une même
société avec les mêmes méthodes. Il est de notre devoir de les combattre, quels
que soient les masques quils prennent.
Yann
Manifeste
pour un juste règlement du conflit israélo-palestinien Des Juifs de Belgique
simpliquent et sexpliquent
«Citoyens de ce pays, nous avons décidé de nous exprimer en
tant que Juifs sur les événements qui embrasent le Proche-Orient. En cette qualité,
nous nous sentons le devoir de condamner la politique menée par les gouvernements
israéliens à lencontre du peuple palestinien au mépris, tant des résolutions
des Nations Unies, que des droits élémentaires de lHomme et du droit des peuples
à disposer librement deux-mêmes. En exprimant notre opposition à cette politique
nous contestons la prétention des dirigeants israéliens à la mener au nom du
peuple juif. Nous voulons aussi témoigner de la diversité des opinions des Juifs
de Belgique à légard dIsraël, contrairement à lidée que certains représentants
de la communauté juive cherchent à accréditer. Nous refusons précisément de
nous laisser enfermer dans une logique de repli identitaire qui vise à détourner
les consciences et les actes du soutien à une cause juste: celle dune paix
fondée sur la reconnaissance dun État palestinien souverain et viable aux côtés
de lÉtat dIsraël avec Jérusalem, capitale des deux pays. Nous estimons que
le combat du peuple palestinien pour son indépendance nationale est légitime.
Loccupation quil endure depuis plus de trente ans, en violation des principes
du Droit international, ainsi que lexil forcé dans lequel sont maintenus les
réfugiés palestiniens nont que trop duré. Toute occupation génère tôt ou tard
une résistance de la part de celui qui la subit. Le climat de violence dans
lequel Israéliens et Palestiniens senferment aujourdhui est le fruit de cette
longue occupation: les racines de leur affrontement sont essentiellement politiques
et non réductibles à un conflit religieux. Proclamer son soutien à la cause
dune paix dont presque tous se revendiquent ne suffit pas. Encore faut-il en
définir les conditions nécessaires. Il convient avant tout de mettre en application
les décisions du Conseil de sécurité des Nations Unies, et en particulier la
résolution 242 qui exige le retrait dIsraël des territoires occupés en 1967.
Nous considérons, en effet quun État palestinien ne serait pas viable si Israël
maintenait sous sa souveraineté ses implantations, illégales au regard du Droit
international, en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem-Est. Lannexion par Israël
de la plupart des terres où ces colonies sont situées ne pourrait avoir pour
conséquence que le morcellement du futur État palestinien: la circulation dune
ville palestinienne à lautre et vers létranger dépendrait du seul bon vouloir
des autorités israéliennes. Comment un État souverain pourrait-il accepter une
telle solution? Cest pourtant bien cela qui a été proposé aux Palestiniens
à Camp David en juillet 2000. Il importe aussi que la viabilité du futur État
palestinien soit garantie par des mesures qui favoriseront son développement
économique et la maîtrise, partagée sur un pied dégalité avec les pays voisins,
des ressources en eau. Le sort actuel des réfugiés est un autre obstacle majeur
à létablissement dune paix véritable entre les deux peuples. Le mouvement
sioniste, après deux mille ans, a institué, pour les Juifs, le droit au retour.
Après cinquante ans, les Palestiniens ne sont-ils pas au moins aussi fondés
à exiger le droit au retour des réfugiés sur les terres dont ils ont été chassés
ou, pour ceux qui seraient amenés à y renoncer, le droit à lindemnisation pour
les biens dont ils ont été spoliés? La reconnaissance par Israël de ce principe
rendrait enfin au peuple palestinien la justice quil réclame et ouvrirait la
porte à une véritable réconciliation. Les accords dOslo auraient pu conduire
par étapes à un règlement du conflit si une dynamique de paix lavait emporté
sur la politique du fait accompli menée depuis lors par Israël. Cette occasion
a malheureusement été manquée. Compte tenu du rapport de force par trop inégal
entre les deux parties et de la mansuétude dont Israël bénéficie de la part
des États-Unis, les négociations bilatérales entre Israéliens et Palestiniens
ont bien peu de chance daboutir sans des pressions exercées par la Communauté
Internationale et tout particulièrement par lUnion Européenne. La persistance
de la situation actuelle constitue une grave menace pour la paix et la stabilité
dans tout le Proche-Orient. Nous demandons dès lors à nos gouvernants belges
et européens de faire prévaloir le Droit international et dagir avec détermination
pour quIsraël sy conforme. Nous tenons également à répercuter lappel dans
ce sens des organisations qui, dans des conditions extrêmement difficiles, militent
au sein du Bloc de la Paix israélien. Nous partageons les convictions des nombreux
Israéliens qui aspirent à la paix avec leurs voisins palestiniens et admettent
aujourdhui leur droit à un État souverain et viable. Ils savent que cest leur
meilleure garantie de vivre en sécurité dans leur propre pays en y préservant
les valeurs démocratiques. Pour notre part, nous resterons mobilisés jusquà
ce quun règlement juste et équilibré mette fin à un conflit qui na apporté
que souffrances et désolation.»
Mise
en question des rapports Etat-nation
Le
nouveau soulèvement palestinien a remis la question dIsraël et de la Palestine
sur le devant de lactualité. Face a la prolifération étatique qui est le produit
de la fragmentation introduite par lactuelle phase de la mondialisation, ne
faut-il pas poser un questionnement internationaliste ? Sans nier la dimension
réactive légitime du nationalisme palestinien au déni sioniste faut-il pour
autant prendre pour slogan la revendication étatiste ? En acceptant le nationalisme
palestinien dans sa dimension étatique ne rend-on pas le sionisme acceptable
? Faute de ce questionnement ne risque-t-on pas de manifester pour un renforcement
du nouvel ordre international ?
Du
sionisme à lEtat dIsraël
Le sionisme peut être considéré comme à la fois un mouvement
national et comme un mouvement colonial. Il nest pas le seul mouvement national
juif. Le mouvement socialiste juif, plus connu sous le nom de Bund, soppose
au sionisme, comme nous le verrons plus loin. La particularité du sionisme est
davoir pour objectif la création dun Etat juif en Palestine (après bien dautres
propositions, comme lOuganda, lArgentine.. ). Pour opérer cette saisie du
territoire palestinien (en 1897, date du congrès de Bâle, les Juifs représentent
3% de la population en Palestine), le sionisme devient un mouvement de colonisation.
Il construit divers mythes, dont celui de la Palestine terre vide, sans peuple.
Selon ce mythe récurrent de lidéologie coloniale, le colonisateur ne trouve
au mieux que des peuples dispersés aux murs archaïques. Dans lidéologue bourgeoise,
des XIXe et XXe siècle lexistence dun Etat est le signe dun progrès de civilisation.
Limmigration des Juifs au lendemain du génocide commis en Europe
par les nazis avec lassistance de leurs divers alliés européens, puis limmigration
qui a suivi la création de lEtat dIsraël, entraînent le renforcement de mouvement
national issu du peuple ignoré, puis chassé. Au projet dun Etat binational
en Palestine, projet de Martin Buber par exemple, le sionisme a toujours répondu
par un Etat juif. En 1993, après la guerre du Golfe, des raisons articulant
diverses échelles (locales régionales et internationales) amènent les accords
dOslo. LEtat dIsraël concède à une autorité palestinienne le soin dassurer
le maintien de lordre dans des mini-zones et donc dassurer la paix sionisme
dans le cadre du nouvel ordre mondial capitaliste.
Limpasse
du nationalisme
Pris
dans un rapport de forces défavorable, le mouvement Fath, qui contrôle lOrganisation
de Libération de la Palestine, sest rabattu sur le projet dun Etat
arabe palestinien représentant au mieux 23% de la superficie de la Palestine
de lentre-deux-guerres, alors placée sous mandat Britannique. Ainsi, le mouvement
national palestinien, dans sa majorité, opte-t-il pour la formule de lEtat-natîon
reproduisant à son tour le schéma sioniste hérité de lEurope du XIXe siècle.
Que peut signifier ladéquation entre nation, Etat et territoire ? Ce modèle
européen a fait des ravages dans le monde méditerranéen, dans les Balkans en
particulier. Il occulte les dimensions constitutives des individus, cest-à-dire
les multiples appartenances. LEtat-nation engendre la production de lhomogénéité,
notamment par une politique linguistique ainsi que par la production de mythes
fondateurs et identificateurs.
En reprenant le modèle dEtat-nation européen, lEtat dIsraël
veut apparaître comme le symbole de la modernité occidentale construite sur
le mode de production capitaliste. Le sionisme sinscrit doublement dans ce
modèle : - En créant une véritable discrimination entre citoyens israéliens
juifs et Israéliens non-juifs, - En prétendant donner une solution au problème
de lantisémitisme. Mais lantisémitisme est justement basé sur la volonté dobtenir
une nation homogène pure. Le sionisme, il faut le rappeler, nest pas le judaïsme
mais une option politique favorisée par les grandes puissances, réactionnaires
sinon antisémites, de lépoque (Grande-Bretagne, Allemagne, Russie, Turquie).
Le sionisme est censé résoudre ainsi la question de lantisémitisme et rassembler
les Juifs du monde entier. Pour les puissances antisémites, cest un moyen de
se débarrasser des Juifs vivants sur leurs territoires. Or, lexistence de
lEtat dIsraël na pas supprimé lantisémitisme. Elle a même donné une assise
aux discours excluant les Juifs des nations européennes. Dune certaine façon,
antisémitisme, sionisme et nationalisme se répondent. Quant au rassemblement
des Juifs en Israël, ce nest pas le cas malgré les politiques de fermeture
des frontières aux USA, notamment aux Juifs de lex-URSS. Loption une nation,
un territoire est minoritaire parmi les Juifs européens jusquà la seconde
guerre mondiale. Il y a eu des ruptures avec le mouvement sioniste à la suite
de la découverte dun peuple vivant en Palestine (1). Créé en 1897, la même
année que le congrès sioniste de Bâle, le mouvement socialiste Bund (union des
ouvriers juifs de Russie, de Pologne et de Lituanie) pose les problèmes des
droits nationaux (langue, culture) sans demander un territoire. Le Bund soppose
au sionisme à partir des réalités sociales et linguistiques de lEurope orientale
et centrale (le Yiddish Land). Le Bund dénonce le sionisme comme une réaction
bourgeoise à lantisémitisme et comme un instrument de division et de désorientation
de la classe ouvrière (2). Alors que le mouvement sioniste reçoit des subsides
de la famille Rothschild, le Bund ne fait pas de distinction entre lémancipation
de lensemble des exploités et celle des Juifs. Le nazisme, en pratiquant le
génocide que lon sait à légard des Juifs, détruisit le Yiddish Land qui a
soutenu pour une bonne part le projet émancipateur du Bund (3).
Questions
pour une approche internationaliste
Avec
les déclarations de suspension du processus de paix du premier ministre israélien
se poursuit le projet de séparation contenu dans les accords dOslo.
Si ceux-ci ne parlent pas dEtat pour désigner lentité palestinienne, il sagit
bien de mettre en place une structure et un territoire (en fait un agrégat de
territoires) sous le contrôle de lEtat dIsraël. Le nouveau soulèvement (INTIFADA)
va-t-il se trouver déplacé vers la réalisation dune structure étatique, assurant
la survie de la direction historique de lOLP-Fatah, faisant fi des quatre millions
de réfugiés dans le monde et des 800 000 Palestiniens restés dans ce qui est
devenu lEtat dIsraël après 1948 ? Le slogan deux peuples, deux Etats masque
le refus de légalité pour les sionistes, laspiration à la survie politique
dun appareil pour les bureaucrates du Fatah. Sa réalisation serait grosse de
difficultés à venir : - Quel statut pour les Arabes dIsraël soupçonnés (comme
les Juifs en Europe) dêtre des citoyens douteux susceptibles de se transformer
en cinquième colonne ? Autrement dit se pose la question de légalité entre
lensemble des habitants (peut-on dire citoyens ?) de lEtat dIsraël. - Quelle
insertion des Israéliens dans le Moyen-Orient si Israël continue à nier la dimension
orientale des Juifs venus du monde arabe (les Misrahims) et pratiquer vis-à-vis
de cette partie de la population une ségrégation à lintérieur même de la population
juive en Israël ?
- Que deviennent les réfugiés palestiniens ou quelle prise en
compte du droit au retour des Palestiniens ? La question du droit au retour
est illustrée par un paradoxe. En effet, le droit au retour existe pour les
Juifs du monde entier qui peuvent devenir automatiquement israéliens. Par contre,
les réfugiés palestiniens nont pas de droit au retour (4). Un Etat démocratique
peut-il se définir par le sang ou la religion comme cest le cas pour lEtat
dIsraël actuellement ? Cest la question du sionisme qui se trouve posée. Pour
que lordre mondial soit assuré, le régime de lautorité palestinienne doit
se situer dans une approche libérale sur le plan social et économique, et autoritaire
sur le plan politique.
Cest lengagement dArafat de ne pas faire intervenir lautorité
palestinienne dans le domaine économique et de ne pas créer de service public.
Le nationalisme palestinien - comme tout nationalisme - masque les clivages
de classes. À lheure actuelle, avec la transnationalisation du capital, le
nationalisme prend un nouveau visage. Instrumentalisé au service des classes
dominantes, fondé sur de prétendues identités (référence à une origine restée
immuable, donc historique), le nationalisme de la dernière décennie na plus
rien à voir avec un quelconque programme démancipation des peuples, ce quil
fut en partie au XIXe et au XXe siècles dans les luttes dindépendance contre
le colonialisme. À présent il sagit surtout dune concurrence étatique sur
le marché international des capitaux. Parce que ces projets nationalistes sont
porteurs dexclusions nouvelles, il convient de remettre en question la fausse
adéquation Etat-nation et poser le problème dune citoyenneté au niveau local,
au niveau régional comme au niveau mondial. Pour ne pas enclencher le mécanisme
des futures épurations ethniques, pour créer des solidarités entre les dominés
Juifs et Palestiniens dans lEtat dIsraël et les dominés Palestiniens en Cisjordanie
et à Gaza, la revendication la plus juste ne serait-elle pas celle dun Etat
binational et laïc en Palestine, dans un cadre fédéral du Moyen-Orient ? Cest
du moins la position dun certain nombre de militants juifs et palestiniens.
Leur voix est encore minoritaire, mais nest-elle pas porteuse dun autre avenir,
plus mancipateur ?
L.
Séminole, le 8 novembre 2000
(texte
paru dans Courant Alternatif, janvier 2001)
Notes
: (1) : Ce fut, par exemple, la démarche de Hans Kohn, disciple du philosophe
Martin Buber, à qui il écrivit en 1929 : Nous sommes depuis douze ans en Palestine,
sans jamais avoir essayé sérieusement de nous soucier de lassentiment du peuple
ou de négocier avec le peuple qui habite ce pays (dans Martin Buber Une Terre,
deux peuples, édition Lieu commun).Après vingt ans de responsabilités dans le
mouvement sioniste, dont dix ans en Palestine, Hans Kohn rompit avec le sionisme
et émigra aux USA.
(2)
: Enzo Traverso, Les Marxistes et la question juive, édition La Brèche, ch.
4 Yid dishkeit ou sionisme ? pp. 111-144. Voir aussi le livre de Henri Menczelles
aux éditions Austral : Histoire générale du Bund, un mourement révolulionnaire
juif.
(3)
: Un des dirigeants de linsurrection du ghetto de Varsovie, Marek Edelman,
était dirigeant du Bund (voir Mémoires du ghetto de Varsovie, éditions du Scribe
Liana Levi, première édition en polonais en 1945, en Français en 1983 pour le
rapport Edelman). Lors dune visite à Varsovie pour commémorer le soulèvement
du ghetto, le Premier ministre israélien Rabin indiquera à Lech Walesa (le président
polonais qui se livra à des propos antisémites lors de sa campagne électorale)
quil refuse la participation dEdelman à cette commémoration.
(4)
: Des Palestiniens ont quitté la palestine en 1948 dans le contexte de lEtablissement
de lEtat dIsraël ; dautres ont fui devant linvasion israélienne de 1967.
Le droit au retour a été reconnu par une résolution de lONU.
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