Walid Attalah: "il s'agit d'un état raciste basé sur la ségrégation"

Dans le cadre de la journée de la solidarité internationale organisée par le collectif «Humani-Terre», Walid Attallah, palestinien, président hexagonal du Mouvement Justice pour la Palestine est venu à Baiona parler de la situation du peuple palestinien face à l'occupation. Le film «Jenine Jenine», censuré en Israël et en France a été projetté avant le débat. Ce film poignant a été tourné juste après les massacres commis par l'armée israélienne, en 2002. Son producteur a été éxécuté, après le tournage, par l'armée. Nous vous présentons une retranscription de l'intervention de Walid Attallah.

Jenine Jenine

Il faut savoir qu'à Jenine 450 maisons ont été détruites ou rasées, des centaines ont été éventrées. Beaucoup d'habitants du camp sont encore hébergés dans des villages ou dans des tentes à l'extérieur du camp. On parle de 67 à 200 tués. On ne sait pas. Beaucoup de personnes ont été ensevelies dans leurs maisons. Il n'y a jamais eu de commission d'enquête suite à ce massacre. Ce camp a été construit en 1948, et tous les habitants viennent des villes qui se trouvaient en Israël. 418 villages ont été détruits lors de la création de l'état d'Israël. Ceux qui ont fui se sont réfugiés dans des camps comme Jenine, ou en Jordanie, en Egypte et ailleurs. C'est sous le commandement de Sharon qu'a eu lieu cette tragédie. Trois bataillons se sont succédés pour ce massacre. Sharon était en 82, ministre de la guerre d'Israël et c'est lui qui a supervisé le massacre de Sabra et Chatilah. 3000 civils palestiniens et libanais y ont été tués. Il faut savoir que les camps palestiniens sont censés être sous la protection des Nations Unies (UNRA). Il faut rappeler que Sharon a commencé sa carrière militaire dans l'unité 101, qui a prouvé sa dextérité dans le village de Québya en 1953. Sharon a mené le massacre de femmes, d'hommes et d'enfants. A la suite de cela, il a été promu colonel. C'est Ben Gourion qui lui a accroché sa médaille. Les palestiniens ont déjà connu cette situation en 1948 . L'histoire continue sur le même tempo, dans un silence assourdissant de la communauté internationale.

Les missions civiles

Au moment du massacre de Jenine, les seuls personnes extérieures présentes étaient des personnes des Missions civiles. Face à la démission des autorités européennes, des personnes ont essayé de sortir le peuple palestinien de l'isolement et de lui assurer une certaine protection. Ism (International Solidarity Mouvment) regroupe des militants de partout pour agir dans ce sens. On veut faire partir un maximum de gens en Palestine. C'est important pour témoigner au retour et apporter une solidarité concrète. Pendant qu'on parle tous les jours, l'armée continue d'ntrer dans les camps. Quand la population répare les infrastructures, l'armée revient les détruire. Il faut toucher cette autre dimension qu'il y a là-bas. On demande un engagement citoyen, pour que les gens, à leur retour, interpellent les élus, que ce soit pour la protection des palestiniens ou pour obliger Israël à respecter les droits des palestiniens. Les accords économiques entre Israël et l'UE sont reconduits, Israël commet, et l'Onu l'a reconnu, des crimes de guerre, et on laisse faire. Le droit international depuis plus de 50 ans n'a jamais été appliqué pour les Palestiniens, seulement pour les Israéliens. Il faut réagir et arrêter de pleurer en disant "oh les pauvres Palestiniens". C'est la responsabilité de tout le monde d'agir.

Le mur de l'apartheid

Le mur va entraîner l'expulsion de 250 000 palestiniens, puisqu'il est construit sur la limite de la ligne verte (la frontière imposée par l'armistice en 1949 et les territoires occupés en 1967). La distance entre cette ligne verte et le mur varie entre 100 m et 20 km. A Jérusalem il atteint 25 km. Tous les villages compris entre la ligne verte et ce mur vont devoir dégager. C'est une annexion de fait de cette partie du territoire par l'Etat d'Israël. Ce ne sera plus des «territoires occupés», mais annexés. Ce n'est pas qu'un mur de séparation, mais un mur d'expulsion. En 47/78, l'objectif du mouvement sioniste était non seulement de s'accaparer la Palestine, mais d'expulser ses habitants, et de construire un Etat uniquement pour les juifs. C'était inscrit dans le premier congrès sioniste en 1897. C'est la droite ligne des objectifs sionistes de l'époque. Le territoire palestinien est devenu une peau de léopard, une tache par ci par là, entourée de colonies que relient des routes interdites de circulation aux Palestiniens (quand une route de 20 m de large est construite, 250 m sont rasés de chaque côté et interdits aux Palestiniens). Sans parler du blocus, des centaines de barrages, qui empêchent les gens de travailler, de se soigner. Des femmes enceintes, des blessés sont morts dans les ambulances aux barrages. Les gens n'ont pas de quoi manger. Le chef d'Etat major israélien, Ayalon, dit lui même qu'il faut arrêter ce blocus, et que les conditions étaient trop dures et entraînaient des réactions violentes des palestiniens.

Le choix d'Israël est de maintenir un Etat de guerre permanent

Les gouvernements des pays arabes, dictatatorials, depuis qu'ils ont été mis en place par le colonialisme français ou anglais, sont soutenus par la communauté internationale. Il y a une alliance de fait entre les grandes puissances et Israël . La Jordanie ne tient que grâce à l'aide des Américains. Même si la population soutient les Palestiniens. Les dirigeants sont là pour réprimer les palestiniens ainsi que leur propre population. Actuellement, il n'y a plus de manifestation autorisée dans les pays arabes. L'Irak a été soutenu par la France, les USA. L'argent du pétrole va dans les banques américaines ; les américains et les israéliens font la guerre aux Arabes avec l'argent des Arabes. Israël ne veut pas discuter de la question des réfugiés. Aujourd'hui, on ne parle plus d'un Etat souverain, mais d'une " autonomie large " où le moindre accord entre cet embryon d'Etat et une tierce partie serait soumis à Israël. C'est un Etat sous tutelle qu'ils veulent. On présente cela comme un accord de paix. A chaque fois, on trompe les gens et on ne veut pas aller sur le fond.

Un etat raciste

La question fondamentale, c'est que le mouvement sioniste, quand il prone l'établissement d'un Etat juif que pour les Juifs, il s'agit d'un Etat raciste basé sur la ségrégation. C'est l'apartheid, voire pire que l'apartheid, car Israël a expulsé les Palestiniens. Si les dirigeants israéliens et les institutions israéliennes, continuent à pratiquer cette séparation entre juifs et non juifs, il y aura toujours un conflit. En Palestine, les juifs, les chrétiens les musulmans ont toujours vécu en paix contrairement à ce qui s'est passé en Europe. Nous, les Palestiniens, on est victime de cette histoire européenne où on nous a jeté à la figure un Etat colonial. Quand nous on parle d'Israël, on dit "c'est un Etat colonial". En Europe on dit "c'est l'Etat des rescapés de la Shoah". Il ne faut pas refuser de voir la réalité. LŒoccident à construit et aide tous les jours un Etat colonial. Mais ici on ne veut pas aborder cette question. Nous, on veut juste avoir nos droits.On veut vivre, comme avant, avec les mêmes droits, que l'on soit juif chrétien ou musulman. Israël reste un cas unique dans l'histoire d'impunité totale. L'éducation en Israël est basé uniquement sur la mémoire de la Shoah et sur rien d'autre. Cela entraîne une peur viscérale de la population israélienne. Ils se recroquevillent sur eux mêmes et sont dans un ghetto. Le génocide des juifs n'est pas de notre responsabilité en tant que Palestiniens. Sharon et d'autres jouent sur cet état d'esprit sécuritaire. On nous accuse de vouloir détruire Israël, mais c'est la Palestine qui a été détruite. En 1948, les Palestiniens ont été jetés à la mer, sur la bande de Gaza. C'est la réalité. Il faut reconsidérer l'Etat d'Israël. L'objectif n'est pas de les jeter à la mer, mais de revendiquer les mêmes droits. Faisons un Etat unique où tous les citoyens aient les mêmes droits.

Les négociations de Geneve et le droit au retour

Ce sont quelques représentants de la société qui ont négocié. Sur le droit au retour des réfugiés, les négociationsne sont pas à la hauteur. Leur retour ne doit pas avoir lieu dans les territoires occupés en 1967, mais dans ceux occupés en 1948. Les colonies ne sont pas que dans les territoire s occupés. Tout Israël est une colonie. 122 villages palestiniens ne sont pas reconnus. Ils n'ont pas d'eau, pas d'électricité, l'interdiction de construire, les hélicoptères surveillent en permanence la population. L'accord prévoit que les réfugiés resteraient dans les pays dans lesquels ils sont exilés. Le retour serait soumis à la seule acceptation du gouvernement israélien. Sans retour des réfugiés, il n'y aura pas de paix. Le retour est la conséquence de l'injustice, de l'expulsion. Israël est un état illégitime. Si on a attaqué le camp de réfugiés de Jenine avec une telle férocité, c'est que Sharon a voulu donner une leçon aux Palestiniens : "renoncez au droit au retour". Les camps sont détruits, et reconstruits à chaque fois. Ils veulent les faire fuir. La résistance palestinienne est née dans les camps. Les premiers à porter les armes ont été les réfugiés. Dès l'expulsion de 1948, les Palestiniens s'infiltraient et revenaient. La première loi contre les réfugiés en 1954 était contre " l'infiltration ". L'accord de Genève est basé sur des postulats pro-israélien set ne garanti en aucun cas nos droits. Le droit au retour pour les juifs du monde entier est garanti. N'importe quel juif peut venir s'installer. Je suis né en Palestine et moi je n'ai pas le droit de retourner chez moi ? Mon grand-père est né sous l'occupation turque, mon père sous l'occupation anglaise, j'ai vu les troupes sionistes entrer dans mon village. C'est de pire en pire.

La question de l'eau

Un des objectifs principaux de la guerre de 1967 était l'eau. Occuper le Golan, c'est mettre la main sur les sources d'eau. Quand Israël a occupé le sud Liban ils se sont accaparés l'eau. En Cisjordanie, les réserves en eau représentent 40 % de l'eau utilisée en Israël. Il manque 5 à 10 % des besoins en eau d'Israël. Rendre les territoires signifie rendre l'eau. Israël n'acceptera jamais. Sous la colonie d'Ariel, il y a d'énormes réserves en eau. A Gaza, les habitants boivent de l'eau de mer. Dans de nombreuses villes, elle est impropre à la consommation, quand elle coule, car des fois, elle est coupée pendant des jours. Un ou deux etats ? Depuis les négociations d'Oslo, et particulièrement avec les gouvernments travaillistes ils ont confisqué des terres à gogo, créé de nouvelles colonies, détruits des villages et habitations. La garantie d'un Etat souverain, c'est la continuité géographique, c'est la terre. Et on touche là au c¦ur du problème. Israël a rendu impossible le fait qu'il y ait un Etat palestinien avec une continuité territoriale. Avec le mur, ce processus s'intensifie. Quand on veut réellement négocier, la moindre des choses c'est de se retirer unilattérallement des territoires occupés. Mais on en revient au projet sioniste. Rendre une partie du territoire du grand Israël, cela compromet le projet sioniste. La question est là : va t on renoncer au grand Israël ? Certains le disent en Israël. Si Israël ne veut pas y renoncer, ce sera toujours le conflit. Si demain il y a deux Etats, il y aura forcément la guerre à partir du moment où Israël conserve ses projets expansionnistes. Israël a été le seul Etat créé par une résolution de l'ONU, ce qui est unique. En dix ans de négociations, depuis Oslo en 1993, la situation a changé. Israël a fait en sorte que la situation soit irréversible. Il y a un occupant et un occupé. On ne peut négocier avec un Etat voulant la disparition de la Palestine. Les deux Etats sont irréalisables. Israël a été condamnée des centaines de fois. Et alors, qui a bougé ? Le droit international, dans ce cas là a été fait pour le plus fort. Israël représente beaucoup pour le monde occidental. Sharon, au pentagone s'est entendu dire "pour nous Israël représente 20 porte-avions en permanence dans la région". Les Usa donnent chaque année 3 milliards de dollars, et font 40 milliards de dollars de bénéfices sur les ventes d'armes aux pays arabes (ainsi que les européens). Beaucoup d'Israéliens viennent à cette solution d'un seul Etat. Il y a de la place pour tout le monde. Dans le cadre de deux Etats que fait-on du 1,2 million de Palestiniens vivant en Israël ? Ils n'ont pas le droit de construire, vivent sans infrastructures. Ce sont des citoyens de troisième zone. Parler de démocratie en Israël c'est de la pure connerie. Et les réfugiés ? Dans les camps les gens sont épuisés et sont prêts à reprendre les armes. En Jordanie il y a deux millions de Palestiniens. Depuis l'Irak, les armes circulent. Tant qu'il y aura de l'injustice, il y aura de la résistance. Comme le dit quelqu'un dans le film, Israël a perdu. On ne fera pas revenir l'espoir qu'il y avait autour d'Oslo. 300 000 Palestiniens ont été emprisonnés durant la première intifada. Les gens voient que les négociations ont été du pipeau. Les gens veulent maintenant aller jusqu'à la victoire. C'est inéxorable pour un peuple d'arriver à sa souveraineté et sa liberté. Ceux qui en le savent pas sont des colons ou des imbéciles. Maintenant il faut prendre ses responsabilités : soutenir la résistance.

Michel Warchawsky, journaliste et écrivain franco-israélien:

Terminer la guerre de colonisation 18 octobre 2003.

la campagne contre le mur de l¹apartheid 11/03

Partir en mission civiles de protection du peuple palestinien

2001/2004 : 3 ans d'agressions impérialistes

De Kaboul à Bagdad via Gaza

dossier gal

DOSSIER PALESTINE

 

 

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